Je viens de recevoir le texte ci dessous, qui m'apprend que Max est décédé. Je l' avais rencontré brièvement lors d'un sumercamp dans le Jura. Nous avions beaucoup échangé sur la situation de la gauche dite Germano-hollandaise, je lui avais même proposé de participer à la revue Echanges, ce qu'il a refusé.
Pour Max
Militant avec Max pendant des décennies au sein du Courant communiste international, le CCI, j’ai partagé avec lui un très grand nombre de réunions, d’interventions dans des réunions publiques, des meetings, de diffusions de journaux ou de tracts, de voyages dans des sections autres que la parisienne... Mais c’est surtout après notre rupture avec cette organisation au cours des années 1990 que nous avons tissé des rapports d’amitié dont je garderai toujours un affectueux souvenir.
Nous fûmes souvent en désaccord avec Max, aussi bien sur des questions politiques que dans des domaines scientifiques ou philosophiques. La liste des questions que nous abordions à deux dans nos longs déjeuners au restaurant, souvent bien arrosés, moments que nous partagions régulièrement jusqu’au début des années 2020, serait bien longue. Mais nos différents étaient toujours des stimulants à la réflexion et à l’approfondissement tant ils étaient amicaux et fraternels.
Max avait une énorme culture dans de très nombreux domaines produit d’une insatiable curiosité et d’une sympathie innée pour la devise du vieux Marx : "Doute de tout". Il avait le don pour dénicher les faiblesses d’une théorie, d’un raisonnement, au risque parfois de couper les cheveux en quatre et d’ignorer où il voulait en venir. Mais j’ai toujours cru reconnaître en lui une passion révolutionnaire et une honnêteté intellectuelle indiscutables.
Max fut un des piliers du Cercle de discussion de Paris que nous avions formé à la charnière des deux siècles avec quelques naufragés du CCI. Nous cherchions à comprendre les raisons de ce que nous considérions comme une faillite de cette organisation et plus généralement à cerner les aspects de la théorie révolutionnaire qu’il fallait remettre en question et redéfinir. Il fut un des rédacteurs de la brochure "Que ne pas faire ?" et un des principaux animateurs du Réseau de discussion international qui chercha à poursuivre cette dernière tâche jusqu’au milieu des années 2000.
Parallèlement Max fut un efficace et éminent expert de l’histoire de certains quartiers de Paris, en particulier de Belleville. A l’origine, il projetait d’écrire un roman qui se déroulerait pendant la période de la Commune de Paris de 1871. Pour cela il accumula pendant de années des recherches et des données sur le Paris de ces années pour y faire vivre les protagonistes de son roman. Celui-ci ne vit jamais le jour mais ses travaux d’historien sont devenus une fin en soi et ont nourri le savoir des institutions qui se passionnent pour l’histoire de cette ville. C’était toujours un plaisir de déambuler dans ces quartiers en l’écoutant commenter ce qu’on voyait.
Max fut aussi un remarquable mélomane de musique classique, folklorique et de chansons populaires, hors pop-rock. Debussy, Brassens ou des chanteuses latino américaines avaient peu de secrets pour lui. De nombreuses fois il nous a enregistré des sélections de morceaux suivant un musicien ou un thème. Ici encore, il possédait une incroyable culture… et générosité.
Mais ne dois-je parler que des vertus de celui qui nous a abandonnés à quelques mois de ses 80 ans ?
Max n’eut pas une enfance facile et peut-être cela laissa des traces dans certains aspects de son caractère, en particulier dans sa capacité à partager des moments de discussion en petit comité. A deux, il était généralement facile et agréable. Au-delà de ce nombre c’était plus délicat. Combien de fois n’a-t-il pas quitté une réunion sous un coup de colère en claquant la porte.
Malheureusement, avec l’apparition de ce qu’on a appelé la crise du COVID et probablement la réalité de cette difficulté de son caractère, notre amitié fut soumise à trop rude épreuve. Max épousa l’essentiel des discours officiels qui ont accompagné cette sinistre période. Pour ma part, ayant depuis 2020 écrit plusieurs textes dénonçant ces discours, je fus violemment, brutalement rejeté dans l’esprit de Max comme un irrécupérable "complotiste"… sans que le temps fut suffisant pour nous permettre de revenir sur ses différents.
Cela ne change rien à la réalité des temps de notre confiance mutuelle et aux meilleurs moments partagés pendant tant d’années.
C’est cela que je retiens aujourd’hui. C’est pour cela que je te remercie aujourd’hui Max, "vieille branche", pour reprendre ce terme qui t’était cher.
Raoul
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