vendredi 12 juillet 2024

Derrière l’Intifada du XXIe siècle ( première partie sur cinq) "La domination américaine au Proche-Orient"

 


Derrière l’Intifada du XXIe siècle ( première partie sur cinq) "La domination américaine au Proche-Orient"

Ce texte (septembre 2001) est paru dans la revue , Aufheben,N°10,2002 en anglais.Ce texte fut aussi traduit en Allemand dans la revue Widcat-zirkular N° 62 , février 2002, et en français en brochure par Echanges et Mouvement en octobre 2003.

 

Derrière l’Intifada du XXIe siècle ( premiére partie sur cinq) "La domination américaine au Proche-Orient"

Derrière l’Intifada du XXIe siècle,partie II Histoire de deux mouvements de libération nationale: le sionisme travailliste et le

Derrière l’Intifada du XXIe siècle,partie III-L’Intifada (1987-1993)

Derrière l’Intifada du XXIe siècle, partie IV -Le « processus de paix » d’Oslo (1993-2000)-

Derrière l’Intifada du XXIe siècle, partie V -L’Intifada du XXIe siècle

Introduction: nationalisme et émergence d’un prolétariat pétrolier

Introduction

 Alors que nous mettons sous presse* les Etats-Unis font un sérieux effort pour sauvegarder le « processus de paix » d’Oslo, effort qui constitue le cœur de leur stratégie, sous couvert de « guerre contre le terrorisme », pour mobiliser la bourgeoisie mondiale et lui imposer l’union. Ceci après une année pendant laquelle ils ont laissé Israël et les Palestiniens s’enfoncer dans un conflit unilatéral, déprimant et sanglant. La façon dont est perçue la caution américaine accordée au terrorisme d’Etat israélien contre les Palestiniens est une composante importante de la réaction ambivalente, voire même du soutien, de nombreuses personnes au Moyen-Orient et ailleurs à l’égard du terrorisme qui a visé le cœur de la puissance militaire et financière américaine. Ceci a brutalement mis en relief le conflit israélo-palestinien, rendant plus urgente que jamais l’analyse des forces motrices de l’Intifada. Au moment des attentats contre le World Trade Center de New York et le Pentagone à Washington, le 11 septembre 2001, ce que l’on a appelé « l’Intifada Al Aqsa » faisait rage depuis environ un an et semblait avoir réussi à saboter la tentative de paix bourgeoise incarnée par les accords d’Oslo. Elle a coûté très cher au prolétariat palestinien, qui a perdu beaucoup plus de vies et ramassé beaucoup plus de blessés que pendant l’Intifada de 1987-1993. C’est en particulier le nombre élevé de morts parmi la population palestinienne en « Israël proprement dit » qui fait la spécificité de cette Intifada, lorsque des localités comme Jaffa et Nazareth se sont soulevées avec des grèves générales et des émeutes, et lorsque la route principale qui traverse la Galilée du Nord a été semée de pneus enflammés dès les premiers jours du soulèvement. De l’autre côté de la Ligne verte, la politique israélienne d’assassinats a régulièrement ajouté au nombre de morts, chaque jour fournissant des témoignages encore plus choquants sur les horreurs du nationalisme et de la répression.

 

Pourtant, ce qui différencie vraiment cette dernière Intifada de la précédente est l’existence d’un micro-Etat palestinien, dont le rôle de policier et le statut de client ont été mis en évidence par le soulèvement. L’Etat israélien a commencé à réoccuper les zones contrôlées par l’Autorité palestinienne, à première vue temporairement. Sans présumer des intentions à long terme de l’Etat israélien, ces incursions ont servi à rappeler brutalement à l’Autorité palestinienne qu’elle est la création d’Israël, et que les Israéliens peuvent aussi détruire ce qu’ils ont créé. Le but de ce texte n’est pas de prédire les développements futurs du conflit israélo-palestinien, mais de replacer la dernière Intifada dans son contexte historique et de la comprendre sous l’angle de la lutte de classe.

 

Beaucoup réagissent au problème palestinien en lançant des appels abstraits à la solidarité entre travailleurs arabes et juifs. En même temps, la gauche léniniste légitime l’idéologie nationaliste qui divise la classe ouvrière, en affirmant « le droit à l’autodétermination nationale » et en offrant son « soutien critique » à l’OLP (1). Au moment où nous écrivons [2001], l’Intifada ne semble pas vraiment à même de détrôner cette idéologie nationaliste. Les travailleurs arabes et juifs « s’unissent et luttent » - apparemment avec leurs bourgeoisies et les uns contre les autres. Cet article soulignera certaines raisons matérielles pour lesquelles les exemples concrets de la solidarité prolétarienne entre Juifs et Arabes sont rares. La classe ouvrière juive a été matériellement avantagée par l’occupation et par la position inférieure des Palestiniens sur le marché du travail, tant en Israël que dans les territoires occupés. Depuis le milieu des années 1970, cet accord (que nous appellerons sionisme travailliste) a régressé, et les travailleurs juifs sont confrontés à l’insécurité économique. L’occupation de la Cisjordanie et de la Bande de Gaza était nécessaire pour loger la classe ouvrière juive en Israël. Les colonies dans les territoires occupés ont joué le rôle de logement social pour compenser l’insécurité économique croissante des travailleurs juifs, et sont devenues un problème insoluble auquel sont confrontés les architectes de la paix bourgeoise.

 

Une position typique de la gauche est d’appeler à la création d’un « Etat socialiste démocratique en Palestine dans lequel Juifs et Arabes pourront vivre en paix (2) ». Cela pourrait nous sembler relativement réformiste, mais un tel appel pour « un Etat binational, laïc et démocratique » est considéré en Israël comme une exigence follement révolutionnaire, même par des activistes relativement radicaux. Depuis le début du siècle, les luttes des deux groupes de travailleurs sont de plus en plus réfractées par le prisme du nationalisme. Toutefois, le spectacle désolant de prolétaires qui s’entretuent n’est pas prédéterminé : le nationalisme au Moyen-Orient est apparu et est entretenu pour réagir au militantisme de la classe ouvrière. Pour nous, l’idéologie nationaliste, telle qu’elle se manifeste au Moyen-Orient, ne peut se comprendre qu’en relation avec l’émergence d’un prolétariat pétrolier et avec la domination américaine dans la région. Par exemple, les formes prises par le nationalisme palestinien - particulièrement l’OLP - étaient une réponse concrète de la bourgeoisie palestinienne en exil à un prolétariat palestinien ouvertement rebelle. Le " processus de paix " agencé par les Etats-Unis naquit de la reconnaissance du rôle récupérateur de l’OLP dans l’Intifada, alors que l’écroulement d’Oslo et la montée apparemment dramatique de l’hostilité islamiste à l’égard des Etats-Unis est liée à l’incapacité de l’OLP de satisfaire les exigences même les plus basiques du nationalisme palestinien. C’est pourquoi il nous faut d’abord comprendre le contexte international au Moyen-Orient, en particulier le rôle hégémonique des Etats-Unis dans la région.

La domination américaine au Proche-Orient

La domination américaine

La première guerre mondiale, de 1914 à 1918, a démontré la valeur militaire du pétrole. Dans son sillage, l’influence de l’Allemagne au Moyen-Orient se trouva considérablement réduite, et il devint évident pour toutes les grandes puissances que l’Empire ottoman ne pouvait plus se maintenir seul (en partie à cause de la révolte arabe de 1917, favorisée par les Britanniques). La Grande-Bretagne et la France s’entendirent pour diviser le Moyen-Orient en sphères d’influence, la Grande-Bretagne contrôlant la Palestine. Alors que le but affiché était d’empêcher la Russie de pénétrer dans cette région, la Grande-Bretagne avait aussi l’intention de contenir les ambitions françaises en Syrie et au Liban, de garantir l’accès au canal de Suez et de sécuriser l’écoulement du pétrole depuis l’Irak. Dès 1947, la position britannique en Palestine n’était plus tenable, en raison du déclin de la Grande-Bretagne comme puissance impériale. Epuisé par la seconde guerre mondiale, attaqué par les colons militants juifs, et de plus en plus diminué en politique étrangère par les Etats-Unis, le Royaume-Uni maintint une position chancelante jusqu’à ce que son « retrait » soit manigancé en 1948 lors de la création de l’Etat d’Israël.

Cette année-là vit l’expansion et la consolidation de l’Etat israélien par la guerre contre ses voisins arabes, et la domination des Etats-Unis en tant que puissance étrangère dominante dans la région. Les intérêts stratégiques des Etats-Unis étaient triples : stopper l’expansion de l’URSS en Méditerranée, protéger les gisements de pétrole de la péninsule arabique identifiés à l’époque, et enfin entraver toute poursuite de l’influence britannique ou française au Moyen-Orient. Pendant les premières années de l’après-guerre, les Etats-Unis considéraient les vieilles puissances européennes, et non l’URSS, comme leurs principales rivales au Moyen-Orient. En 1953, en Iran, le coup d’Etat de Reza Pahlavi soutenu par la CIA - en réaction à la nationalisation par l’Iran des gisements de pétrole appartenant aux Britanniques* - eut pour effet le transfert de 40 % du pétrole britannique vers les Etats-Unis. Le coup d’Etat transforma l’Iran en Etat-client des Etats-Unis dans le " ventre mou " de la frontière sud de l’URSS, en bastion de la " culture occidentale " au Moyen-Orient. De même, pendant la crise de Suez de 1956, les Etats-Unis empêchèrent la Grande-Bretagne et la France de réaffirmer leurs intérêts nationaux en Egypte, obligeant ces vieilles puissances impériales à jouer les seconds violons de l’Amérique au Moyen-Orient.

Cependant, une fois l’Egypte dans l’orbite soviétique, à la suite du coup d’Etat des Officiers libres en 1952, et de la signature d’une vente d’armes avec la Tchécoslovaquie en 1955, les Etats-Unis comprirent que l’Union soviétique tentait de jouer les gros bras dans la région. L’endiguement de l’URSS devint alors le mot d’ordre officiel de la politique étrangère américaine, ce qui signifiait placer des obstacles sur la route de l’influence soviétique au Moyen-Orient. La politique sous-jacente était la protection à tout prix des intérêts économiques américains.

Les intérêts économiques de l’Amérique au Moyen-Orient

L’intérêt principal de l’Amérique dans la région est bien entendu le pétrole. En même temps qu’elle plaça les Etats-Unis au sommet de la hiérarchie impérialiste, la seconde guerre mondiale confirma la position centrale du Moyen-Orient comme principale source de pétrole. Un rapport du Département d’Etat de 1945 qualifiait l’Arabie Saoudite de « source prodigieuse de puissance stratégique, et l’une des possessions les plus importantes de l’histoire du monde ». Peu de choses ont changé depuis, sinon que le pétrole acquit une valeur encore supérieure lorsque l’Amérique entra dans sa phase dynamique d’expansion fordiste, au cours des deux décennies qui suivirent la seconde guerre mondiale.

Lorsque la production automobile et l’industrie pétrochimique remplacèrent la construction de voies ferrées comme lieux clés de l’expansion, le capital alla du charbon au pétrole, qui devint la matière première essentielle. Les sources d’approvisionnement en pétrole, surtout le Moyen-Orient avec ses énormes réserves, acquirent une importance cruciale. La valeur du pétrole ayant été soulignée par la crise énergétique des années 1970, les Etats-Unis ont utilisé tous les moyens possibles pour se procurer le pétrole de cette région avant et par-dessus tout le monde. Pour les Etats-Unis, une source de profits secondaires, mais non négligeables, est constituée par l’écoulement des pétrodollars arabes vers l’Amérique du Nord sous forme d’achats de matériel militaire, de projets de construction, de dépôts bancaires et autres investissements, phénomène qui date des années 1970.

Le nationalisme panarabe et le prolétariat de la production pétrolière

Au début, l’Etat d’Israël nouveau-né tenait très peu de place dans les préoccupations américaines. En fait, pendant la crise de Suez, l’Amérique s’était alliée à l’Egypte contre l’expansionnisme d’Israël. Ce ne fut que dans les années 1950, lors de l’émergence d’un nationalisme arabe plus affirmé, que les Etats-Unis commencèrent à saisir le potentiel d’un partenariat stratégique construit avec l’« entité sioniste ». La croissance de la production pétrolière au Moyen-Orient avait amené des société autrefois traditionnelles à se moderniser rapidement. Une nouvelle bourgeoisie émergea de la classe militaire et bureaucratique, au service de l’accumulation nationale, favorable au modèle de développement capitaliste de l’URSS et hostile à l’« impérialisme ».

La forme d’anti-impérialisme la plus cohérente était le nationalisme « panarabe ». Les origines du panarabisme se trouvent dans l’Empire ottoman, qui avait unifié les Arabes sous la férule turque, mais qui s’était écroulé à la suite de la première guerre mondiale. Les puissances impérialistes découpèrent alors le Moyen-Orient dans le but de conquérir et de contrôler de nouveaux marchés et des matières premières d’importance stratégique. Pourtant, ces nouvelles frontières allaient à l’encontre « du langage commun, des coutumes et des traditions » conservés par les habitants de l’ancien Empire ottoman. Dans l’idéologie panarabe, une « communauté naturelle », basée sur l’idéalisation des relations sociales précapitalistes, sert à neutraliser les antagonismes de classe. Au moyen d’un mouvement politique moderniste, le panarabisme a pu utiliser cette « communauté naturelle » imaginaire pour faire avancer son projet de modernisation et pour récupérer la lutte de classe. En tant que mouvement nationaliste, le panarabisme servit à diviser et à coopter la classe ouvrière de la région, favorisant ainsi la promotion du développement capitaliste. Malgré cela, son penchant pour l’URSS et ses tendances au capitalisme d’Etat menaçaient les intérêts du capital occidental (3). Bien que ces intérêts n’aient en aucun cas été semblables pour les différentes capitales occidentales, à long terme, les tendances au capitalisme d’Etat du nationalisme arabe risquaient d’empêcher le capital occidental d’accéder librement aux gisements pétroliers du Moyen-Orient.

Mais le nationalisme arabe, pendant les brèves périodes où il s’est incarné dans un panarabisme combatif, a été réduit en poussière par Israël. Et sur le plan économique, les bourgeoisies des différents pays arabes ont, tôt ou tard, découvert qu’il était difficile de résister à l’énorme soutien économique qu’apporterait un réalignement avec l’Amérique (4). Pour la bourgeoisie arabe (et l’OLP ne fait pas exception), qu’elle soit ou non ouvertement panarabe, la difficulté, si elle ne voulait pas affronter des défis intérieurs, était de s’allier avec l’Amérique de façon crédible tout en paraissant maintenir en vie le rêve de l’indépendance arabe et la destruction d’Israël. En 1973, cette tension se traduisit par la hausse du prix du pétrole décidée par l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), ressentie comme une réaction à la guerre d’octobre entre Israël et les Etats arabes. Cependant, les exigences du prolétariat de la production pétrolière signifiaient que, dans certains pays, on dépensait une part disproportionnée des augmentations du prix du pétrole imposées par l’Opep pour répondre aux besoins de la classe ouvrière, plutôt que pour atteindre les niveaux technologiques supérieurs nécessaires au développement industriel (5).

Les impératifs stratégiques de l’Amérique se durcirent autour de deux objectifs : d’abord contenir la menace que représentait l’Union soviétique et, deuxièmement, écraser ou, là où c’était possible, coopter les expressions variées du nationalisme arabe qui déferlaient sur la région.

En plus de sa méthode habituelle d’intervention à l’étranger - c’est-à-dire soutenir avec enthousiasme la faction de la bourgeoisie pro-occidentale la plus crédible, coopter autant que possible tout mouvement populaire, et faire éliminer les provocateurs impénitents - les Etats-Unis inventèrent un moyen raffiné de représenter le Moyen-Orient comme la partie du monde en crise permanente et, de toute façon, impossible à comprendre. La politique américaine devint donc " gestion de crise " et " apport de paix à l’endroit le plus troublé du monde ". Qu’importe la crise, le pétrole et les pétrodollars continuaient à s’écouler d’est en ouest, et les Etats-Unis n’ont pas eu à lutter beaucoup pour faire durer la paix bourgeoise dans la région (6).

Le nationalisme palestinien, rejeton bâtard du sionisme travailliste

Bien qu’Israël soit proche des gisements pétroliers du Moyen-Orient, il n’en possède pas, ce qui a accru sa vulnérabilité stratégique par rapport à ses voisins. Pourtant, en tant que « bastion de la culture occidentale dans une mer de sous-développement gouvernée par de petits despotes (7) », les Etats-Unis utilisent l’image d’Israël pour maintenir leur contrôle sur les gisements pétroliers. Depuis la fin des années 1950 et par la suite, l’accroissement spectaculaire de l’aide financière et militaire signifiait de tout évidence que les Etats-Unis considéraient Israël comme un atout stratégique qui contrebalançait, et était en fait capable de dominer l’Egypte et la Syrie, Etats clients des Soviétiques. Les guerres de 1967 et 1973 ont démontré au monde arabe toute la puissance acquise par l’Etat d’Israël. Il était devenu la superpuissance de la région. L’aviation israélienne, en particulier, pouvait venir à bout de l’est de la zone Méditerranée.

Israël avait encore une autre utilité pour les responsables politiques américains. Piqués au vif par leur expérience vietnamienne, et souvent empêchés d’intervenir comme ils l’auraient voulu dans les endroits politiquement sensibles du monde par leur opinion publique inquiète de leur réputation internationale, les Etats-Unis utilisèrent fréquemment Israël, surtout pendant les années 1970 et 1980, comme intermédiaire pour livrer de l’argent et des armes à divers mouvements contre-insurrectionnels, ou persuadèrent Israël de le faire. Les classes dirigeantes du Zaïre, d’Afrique du Sud, d’Angola, du Salvador, du Guatemala et d’Indonésie, sont au nombre de celles qui bénéficièrent de l’aide opportune d’Israël lorsqu’elles cherchaient à se protéger de leurs opposants.

Alors que la bourgeoisie des Etats-Unis a toujours eu tendance à être pro-sioniste, Israël n’a « jamais suffi » à garantir la sécurité de ses intérêts. Les Etats-Unis ont dû s’occuper sans intermédiaire des Etats arabes, ce qui s’est parfois révélé être une stratégie à hauts risques et ne leur a pas toujours été favorable. Quoique les Etats du Golfe et la Turquie n’aient jamais remis en question leurs rôles d’Etats clients, le nationalisme arabe, le « socialisme » et l’islamisme ont tour à tour poussé différents pays arabes à une certaine intransigeance dans leurs relations avec les Etats-Unis, comme par exemple l’Egypte de Nasser, la Syrie de Hafez-el-Asad et l’Iran des mollahs.
En ce moment, deux problèmes donnent des insomnies aux responsables politiques américains. Le premier est la montée de l’islamisme, d’abord encouragé par les Etats-Unis pour contrebalancer l’influence de l’URSS, mais qu’il est devenu presque impossible – ou du moins très compliqué pour les Etats-Unis et ses Etats clients – de récupérer. De la Syrie à la Jordanie et à l’Egypte, les prisons du Moyen-Orient sont remplies d’islamistes radicaux anti-américains. Le deuxième problème est la question palestinienne récurrente. La création par Israël d’une importante diaspora palestinienne au sein du prolétariat de la production pétrolière au Moyen-Orient a conduit des sections de la bourgeoisie arabe à prendre des positions anti-américaines radicales. En tant que « chien de garde » de l’impérialisme américain, Israël a fourni la menace extérieure qui a unifié les bourgeoisies arabes naissantes et mobilisé les travailleurs arabes. Chaque fois que la bourgeoisie arabe s’est sentie menacée par l’hostilité prolétarienne, elle a pu retourner la colère du prolétariat contre « l’ennemi véritable » : Israël.

Après 1967, l’OLP est devenu le moyen d’expression principal du panarabisme. Face à l’hostilité panarabe, la bourgeoisie israélienne a recherché des alliances militaires avec des pays islamiques non arabes. Toutefois, le renversement de la dynastie Pahlavi en 1979 a coupé court à l’association d’Israël avec l’Iran. Le nouveau régime chiite fut, entre autres choses, encore plus violemment anti-occidental que les nationalistes arabes (8). Plus récemment, Israël a trouvé avec la Turquie un nouvel allié non arabe dans la région. Donc la forme de nationalisme panarabe, qui fut la base idéologique du nationalisme palestinien, a été liée avec et entretenue par le sionisme (9). Tout comme son ennemi mortel, le sionisme était un mouvement politique nationaliste basé sur la « communauté naturelle » idéalisée, dans ce cas celle des Juifs (10). Il est impossible de comprendre le soulèvement actuel, et l’idéologie nationaliste qui l’envahit, sans comprendre le nationalisme auquel il cherchait à s’opposer, c’est-à-dire le sionisme. Jusqu’à assez récemment, on pouvait appeler sa forme dominante « sionisme travailliste », et c’est à lui que nous allons nous intéresser maintenant.

 

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