BNP: La grève de 1989/1990
Avant propos :
Voici réédité, sans trop de changement le texte que j’avais fait
rapidement suite à la grande grève de la BNP de 1989 et 1990 à
laquelle j’ai participé régulièrement en tant que manifestant,
malgré une atroce sciatique. A bien des égards cette grève me
rappela celle des dactylos des AGP assurances de 1975, avec leur
journal quotidien « En lutte ». C’est tambour battant,
défiant toutes les tentatives d’intimidation que « les
tâches d’huile » menèrent l’un des plus important conflit
dans la Banque. Des années après, nous pouvons faire le triste
bilan général de la situation du tertiaire ou bien souvent se sont
des minorités qui devaient se mouiller pour l’ensemble, prendre
les coups pour l’ensemble. Depuis des années maintenant, la classe
capitaliste porte au prolétariat ( et les employés sont des
prolétaires) des coups de plus en plus durs, remise en cause des
acquis des Conventions Collectives, voir bientôt du code du travail…
Comme nous disons, pour nous consoler « la défaite est la mère
des victoires » en définitive, la classe au pouvoir voit
toujours des agitateurs, des révolutionnaires, des partis politiques
derrière chaque mouvement de grève. Jamais il ne lui vient à
l’esprit, que le plus grand agitateur c’est le patronat lui-même,
par les mesures qu’il prend contre les prolétaires, par les
conditions de travail de plus en plus agressives qu’il introduit
qui fait que la révolte est encore ce qu’il y a de plus humain
dans ce monde froid de l’argent roi.
Gérard
Bad
1-ORIGINE DE LA GRÉVE.
Cette grève va s’enclencher le 12 décembre 1989 à partir de revendications principalement salariales. Partie du COE Centre Opération Etranger), la grève malgré sa longueur deux mois restera minoritaire tout au long du conflit.
Au 3 éme jour de grève, un comité de grève est élu et se charge d’éditer, chaque jour, une feuille d’information sur l’évolution du conflit. « TACHE D’HUILE » c’est dorénavant le nom de cette feuille, mais aussi celui des grévistes du comité de grève.
2 - LES REVENDICATIONS.
Elles vont sensiblement évoluées tout au long du conflit, mais resteront centrées sur :
65000 frs minimum à l'embauche
1500 frs pour tous = 125 points
La refonte des cœfficients.
Dix points de technicité
Le remboursement des heures de grève.
Le rapatriement des travaux effectués à l’extérieur par les façonniers.
Il faut préciser que le sa1aire d'embauche de la BNP (Première banque européenne) est le plus minable de la profession (4437 F net sur 14 mois et demi).
3- LA CONDUITE DE LA GREVE.
Elle est animée, par un Comité de grève composés de syndiqués et de non syndiqués, les décisions sont prises en Assemblée générale, les membre du Comité de grève sont révocable a tout moment. Au début du conflit, le Comité de grève sera soutenu et se fera soutenir par les syndicats, à la fin du conflit il prendra position contre la trahison « des compagnons de route ».
4- DU MARDI 12 AU DIMANCHE 24 DECEMBRE.
Par AG, le grève est reconductible chaque jour, le 18 décembre manifestation dans les rues de Paris de 1000 grévistes au siège social, intervention des grévistes sur différents centraux (Voltaire, UTC, les halles, St Georges, CCFD, Bergère, DCE.) Le lendemain les grévistes du CCE lancent par téléfax un appel au débrayage des agences Paris et province avec nouvelle manifestation devant le siège de la BNP.
Le 21, les grévistes vont bloquer la plage informatique du COE et l’accès à la cours Barbés des transporteurs de fonds. Des A.G. se tiennent à Cadet et Voltaire blocage du service courrier. Le 22 décembre, le personnel en grève vote l’organisation du blocage des points stratégiques de la Banque la direction envoie des huissiers, ce qui indique qu’elle commence à faiblir et pense que les fêtes de Noël et du jour de l’an ne mettront pas fin au conflit.
5- DU LUNDI 25 AU DIMANCHE 31 DECEMBRE.
A Voltaire, c’est maintenant 20 tonnes de courrier qui sont bloqués, débrayage à Jules César, UTC, St Georges et les Halles en grève depuis le 21 décembre 1989 (30% de grévistes). Parution du N°1 de « tache d’huile agence ». Au cours de cette semaine, les grévistes font une offensive médiatique pour faire connaître leur grève et commencent à procéder à des appels à la solidarité financière.
La Direction frappe de nouveau : assignation de 18 grévistes en référés.
La province commence seulement à bouger.
6- DEMAINE DU LUNDI 1 AU DIMANCHE 7 JANVIER.
Le 29 décembre, les grévistes des agences décident de former une coordination des agences en lutte et dépose des revendications complémentaires :
Augmentation des effectifs et arrêt des réductions de postes.
Refus de l’ouverture du samedi et toutes les formes de déréglementation des horaires de travail.
Respect de la dignité du personnel.
Une manifestation de 3000 personnes est organisée devant le siège social. La négociation avec la Direction Générale ne va rien donner. Cette direction compte maintenant sur l’intervention des forces de l’ordre pour boucler le conflit. Elle vient en effet d’obtenir en référé cette possibilité.
Le Comité de grève s’adresse à la clientèle et se prépare à une manifestation avec grève générale de la Banque pour le 4 janvier. Nous sommes au de grève et le comité de grève donne le compte rendu du référé du 27-12
SST et BNP menacent de licencier. En déployant maintenant la force d’un côté, et en élargissant le mouvement par une « grève syndicale », l’AFB ( patronat des banques) tente de faire éclater le mouvement gréviste. C’est la tactique très classique du feu d’artifice, et on va se coucher ( au sens propre et figurer). Les salariés en lutte vont rapidement se rendre compte de la sainte alliance syndicalo-patronale, l’intersyndicale qui s’était engagée en AG à ne rien signer, va selon les grévistes les « trahir », la CGT comme dans beaucoup de conflits puissants aura son éternel rôle de « voiture balai ». Elle va rester avec les grévistes encore un temps, uniquement pour accélérer la démoralisation et justifier une reprise « tous ensembles dans la dignité et contre les signataires »…
Le 4 janvier, lors de la manifestation devant l’AFB, les grévistes cherchent en vain les syndicats ( CFDT,FO,CFTC,SNB) ils sont tous à l’écurie.
7- SEMAINE DU LUNDI 8 AU DIMANCHE 14 JANVIER.
Comme le mouvement ne faibli pas, dés le lundi 8,les grévistes votent en AG la reconduction de la grève et l’intersyndicale (CGT,CFDT,CFTC,FO,SNB) est bien contrainte par la force des événements à s’engager de nouveau à ne rien signer. Visiblement la stratégie de reprise a lamentablement échouée, la mobilisation s’amplifie en région parisienne et en province la Direction frappe encore : 14 assignations en référé à Lyon.
Au cours de cette semaine, les collectes de solidarité se poursuivent, ainsi que les manifestations. La grève est toujours ascendante. Le 11 janvier 1990, le Comité de grève va mettre l’accent sur la défense juridique de la grève, c’est une erreur de sa part , au lieu de dénoncer l’aliénation juridique le Comité de grève va s’empêtrer dedans et va lui-même légaliser et syndicaliser la grève.
8- SEMAINE DU LUNDI 15 AU DIMANCHE 28 JANVIER.
Le mercredi 17 janvier, les grévistes font une visite « surprise » à la Bourse, celle-ci est protégée par les forces de l’ordre empêchant les manifestants de pénétrer dans la salle des marchés. A cette date se tiennent les négociations de branche avec le patronat de la banque. Elles se termineront par la signature d’un accord de branche sur les salaires par le syndicat Force Ouvrière. A la BNP, la direction commence à s’essouffler et prend pour inciter à la reprise la décision unilatérale d’attribuer :
Une prime de 18% d’une mensualité avec un plancher de 2000F.
Une attribution de 5 points pour les coefficients 245 avec un rappel de 927 F.
Le 19 janvier, une manifestation de 6000 personnes se groupe devant le ministère des finances. Un groupe de 100 grévistes va faire débrayer 50% de l’agence « Grande Armée ». Nous constatons, que la Société Générale qui a déjà vécu une grève du même genre en 1982 temporise et propose préventivement une prime de 6% du salaire de janvier avec un minimum de 800F.
Le 25 janvier, imposante manifestation des employés , de mémoire d’employé commente « Tache d’Huile » » nous n’avions jamais vu la cour de Clignancourt et la rue de Sofia remplies de tant de grévistes ».
9- SEMAINE DU LUNDI 29 AU DIMANCHE 4 FEVRIER.
Le 30 janvier il y a une nouvelle manifestation, elle regroupe seulement 1300 grévistes, et dans le dos des grévistes les syndicats signent.
« Le comité de grève : Nous attendions des protestations virulentes erreur consensus de la « Bande des quatre » ! Ils signent ! Pour eux les négociations sont terminées ils appelleront à la reprise. « (Tache d’Huile N°33)
« Les syndicats CFDT,CFTC,FO, et SNB se sont vendus aux patrons pour un plat de lentilles… et la BNP utilise cette trahison et enfonce le clou en déclarant que ceux qui seraient pas au travail ce vendredi 2 février ne bénéficieraient pas de l’accord… ( T.H. du 2 février 1990).
Les bureaux syndicaux seront saccagés.
SEMAINE DU LUNDI 5 AU DIMANCHE 11 FEVRIER.
Le 5 février, malgré la signature, les menaces… la mobilisation est toujours puissante, la manifestation devant le siége de la BNP encerclait les deux immeubles. Le 6 ils sont encore 2000 dans la rue de nouveau devant le siège de la BNP mais les premiers signes de reprise se manifestent. Au 41éme jour de grève, c'est-à-dire le 8 février 1990, le Comité de grève va organiser un vote sur les trois tendances qui se dégagent :
Continuer la grève
Trouver de nouvelles formes d’actions,
Reprendre le travail.
A partir du 43éme jour de grève, le ton habituellement très prudent de « tache d’huile » devient plus menaçant. Le 22 février, un tract signé « des Taches d’huile » s’attaque aux syndicats, et pour la première fois depuis le début de la grève à la CGT :
« Pour la CGT, beaucoup d’entre nous ont eu davantage confiance ; d’une part parce que la CGT était à l’initiative du mouvement pour les 1500F. et d’autre par parce qu’elle appuyait le comité de grève, ses initiatives. Eh bien là, tout s’est ultérieurement gâté. Après le 30 janvier, nous avons vu la CGT tenir en A.G. un discours combatif mais ne pas tout faire pour assurer, à nouveau, la liaison avec la province en appelant les minorités combatives à débrayer. »
Fin de grève
Bibliographie:
Brochure GREVE du printemps 1982 à la société génerale.
La grève de Mai -juin 73 ( section CGT-Force ouvrière des employés et cadres de la C.P.CA.M.R.P.
Brochure Un syndicat du commerce qui s' organise et se bat... CFDT Rennes. 53 pages.
Lutter dans un grand magasin, Des travailleurs de la Samaritaine et la CFDT .,80 pages
Le « MAI » des banques, 98 pages ed.SYROS réalisé par des militants CFDT.
Une expérience d' organisation ouvrière
Le Conseil du Personnel des Assurances Générales-Vie. 64 pages.
Pour les statistiques: Le site de L' AFB Association Française des Banques et celui de l' observatoire des emplois de l' assurance R.o.m.a
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