C’est par la transformation des dettes
privées en dettes publiques, à coup de milliards de dollars, d’euros,
de yens… que la croissance économique est tant bien que mal maintenue.
Ce qui n’annule pas l’élimination des surcapacités de production à
l’échelle mondiale.
L’industrie
automobile est l’exemple le plus frappant de cette situation où nous
assistons à une redistribution des cartes à l’ échelle mondiale, la zone
Asie-pacifique prenant en apparence l’ascendant sur les anciennes
implantations de cette industrie. Bien que cette zone, est elle aussi en
état de « surchauffe » c’est-à-dire en surcapacité .
Tous
les États, de plus en plus en déficits, commencent depuis quelques mois
à lever des emprunts sur les marchés financiers, pour financer les
mesures anti-crise. Nous allons voir bientôt des masses d’obligations et
de bons du trésor se déverser sur les places financières, et ces mêmes
places financières exigeant que l’argent rapporte de l’argent, entrer
dans l’angoisse dès qu’un État se trouvera en difficulté sur sa dette.
Nous venons de nous en rendre compte, quand Dubaï n’était plus en mesure
de régler ses dettes. De même pour la Grèce, selon l’ OCDE sa dette
publique pour cette année est de 75,3% du PIB c’est-à-dire 300
milliards d’ euros, qui devrait atteindre 89,3% en 2010. Les agences de
notation viennent de déclasser ce pays, bientôt considéré en cessation
de paiement. La Grande Bretagne est elle aussi dans une situation
critique et selon la presse pourrait être déclassée. Ce n’est pas la
première fois que des États sont en faillite, la Yougoslavie a été
démantelé dans les années 1990 du fait de son surendettement [1] et la
Serbie bombardée par l’ OTAN, en 2001 c’est l’ Argentine qui allait
boire le bouillon, au point que le FMI lança l’ idée, qui avait déjà
émise lors de la crise asiatique, qu’il fallait légiférer sur le «
risque pays ».
Ce qui est nouveau aujourd’hui, c’est
que le risque pays ne concerne plus seulement des pays comme la
Turquie, le Liban, la Thaïlande, la Corée du sud …Mais directement des
pays de l’ OCDE. Le journal La Tribune du 15 mai 2009 parlant des états
Unis dit: « Ils devront dévaluer le dollar, mais cela ne suffira pas,
ils devront également renégocier leur dette. ».
Pour
le moment, les gouvernements cherchent à étaler, dans le temps et sur
les peuples, le remboursement de montagnes de dettes, d’où toute la
propagande médiatique sur la fiscalité, et les paradis fiscaux, le
premier ministre grec G. Papandréou en appelle à l’ union nationale
contre la fraude fiscale, mais la jeunesse se révolte contre la
précarité et passe à des actions radicales …En France on a mis en
couveuse le corbeau de la banque suisse HSBC et sa liste de « fraudeurs
du fisc ». On fait semblant de s’attaquer au grand capital , comme par
exemple en indiquant que les entreprises du CAC 40 trichent et que les
PME ( petites et moyennes entreprises) payent plus d’impôts que les
multinationales. Mais dans la réalité, c’est 31, 2% du PIB de l’ UE
d’aides publiques qui a servit en autre au rachats d’actifs toxiques,
les voilà les vrais bonus.
Le
président de la république française, Sarkozy en personne a déclaré tout
haut que les 35 milliards d’euros d’emprunt se feraient non pas sur le
dos des français, mais par un appel au marché financier. C’est
exactement ce qui fut fait pour combler le trou de la Sécu, c’est le
marché qui est intervenu, et c’est le populo qui banque la CRDS
directement prélevé sur la quasi-totalité des revenus, y compris les
allocations familiales, les allocations chômage.
La
facture finale, des intérêts de la dette, est colossale. Selon la Cour
des comptes, la charge d’intérêts des emprunts contractés par la CADES
s’élève à 2,9 Md€ par an en moyenne sur la période 2005-2009, contre 1,4
Md€ sur la période 1996-2004, soit un total de 25,7 milliards d’euros
versé au capital financier depuis 1996.
Mais,
il y a aussi , du fait de la rétraction du marché mondial une tendance
au protectionnisme qui s’ amorce. Les grandes messes sur l’ écologie «
il faut sauver la planète » sont de cet acabit, il s’ agit d’élever des
normes « écolos » c’est à dire des taxes, pour protéger certains
secteurs de la concurrence. Le recours aux dévaluations compétitives est
de retour, il consiste à faire chuter sa monnaie afin de donner un
avantage à ses exportations. Par exemple la Grande Bretagne a laissé la
Livre sterling se déprécier de 20% par rapport à l’ euro depuis août
2008, ce qui en fait revient à dissimuler une taxe de 20% sur ses
importations. Il en est de même pour le dollar en chute libre, le franc
suisse, le dollar canadien… Le cycle des dévaluations compétitives est
en pleine action, Tout ce concentre sur le vrai argent c’est à dire sur
des valeurs sûres et non plus sur des billets de papier fraîchement
produits par la planche à billet; d’où un certain retour vers l’or
considéré comme la valeur refuge a minima.
Avec
le déplacement des dettes privés, celles des propriétaires des moyens
de productions et d’ échanges, en dettes publiques, nous avons une sorte
de socialisation des moyens de production, sauf que le propriétaire de
l’État, ce n’ est pas le peuple. L’État est au service du capital
financier et la seule propriété qu’il accorde au peuple c’est la dette
publique, sa seule identité nationale c’est de payer les impôts et
taxes.
«La dette publique, en
d’autres termes l’aliénation de l’état qu’il soit despotique,
constitutionnel ou républicain, marque de son empreinte l’ère
capitaliste. La seule partie de la soi-disant richesse nationale qui
entre réellement dans la possession collective des peuples modernes,
c’est leur dette publique. »
(K. Marx T. 1 p. 721 du Capital éd. Moscou)
Mais encore:
«
Le peuple sait bien, par sa propre expérience et les saignées faite à
sa bourse, combien la dette publique pèse sur les impositions; mais peu
de gens savent dans quelles conditions spéciales cette dette a été
contractée et existe toujours. L’État, cet instrument commun entre les
mains de nobles propriétaires fonciers, et des gens de la finance, a
besoin d’ argent pour réaliser, à l’ intérieur comme à l’ extérieur,
l’œuvre d’oppression. Il emprunte donc chez les capitalistes et
usuriers, et leur remet un bout de papier, par lequel il s’ engage à
payer, pour 100 livres sterling prêtées, tel chiffre d’ intérêt. Les
moyens nécessaires à ce paiement, il les tire, sous forme d’ impôts, de
la poche des classes ouvrières. Si bien que le peuple doit servir de
garantie à ses oppresseurs vis-à-vis des gens qui prêtent leur argent
pour qu’on lui coupe le cou à lui, peuple. Cette dette figure sous
diverses rubriques, suivant que le taux d’ intérêt est de 3,3 ½ ou 4
0/0. » ( K. Marx People’s Paper, 16 avril 1853.)
Nous
voyons que cette histoire de la dette publique, ne date pas d’hier et
que tous les appels à la nation à l’identité nationale ne sont que des
justificatifs pour sauver le capital.
«
Si les démocrates exigent la régulation de la dette publique, les
ouvriers doivent exiger la banqueroute de l’ État. » (Karl Marx, 1ère
Adresse du Comité de la ligue des communistes,1850.)
G. Bad, décembre 2009
Note
[1]
Le pays commence à s’endetter au début des années 80 et les dernières
mesures d’ajustement font peu à peu baisser le niveau de vie de 40%
(dévaluations successives). Puis en 89, le gouvernement cherche à se
rapprocher de Washington qui impose le démantèlement du modèle de
gestion autonome particulier à la Yougoslavie et qui a donné des
résultats très valables dans les années 60 et 70. Il y a alors des
réformes profondes: dévaluations et restrictions budgétaires,
privatisation des entreprises et liquidation de celles qui n’étaient pas
jugées compétitives, ouverture des frontières commerciales et
libéralisation du système de crédit. Tout un secteur économique est
liquidé entraînant chômage et baisse des revenus (80%). En même temps,
le système de sécurité sociale gratuite est démantelé. Toutes ces
mesures sont imposées afin d’obtenir de nouveaux prêts servant à
rembourser les prêts précédents ! Enfin, est imposé le gel des
transferts du gouvernement central vers les républiques. Celles-ci,
riches ou pauvres, étaient obligées de trouver leur financement propre.
La “balkanisation” de l’union des Républiques Yougoslaves était devenu
un fait.
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