dimanche 16 juin 2024

LA RUSSIE ET L' UNION EUROPÉENNE CONFRONTÉES AU DANGER DE GUERRE.

 


LA RUSSIE ET L' UNION EUROPÉENNE CONFRONTÉES AU DANGER DE GUERRE.

La renaissance de la puissance militaire russe

 Avant propos

 «  c’est toujours les intérêts économiques, le sauvetage du taux de profit qui poussent les grandes puissances à s’unir contre les capitaux les plus faibles pour le partage du butin. Depuis la liquidation de Yalta et le démembrement de l’URSS, le repartage du monde est à l’ordre du jour des jeux diplomatiques et l’Allemagne est au centre des contradictions comme puissance montante. L’alliance est une alliance pour le dépeçage du bloc de l’Est, il s’agit de repousser la Russie vers l’Orient et de lui couper tout débouché directe sur la Méditerranée, pour y parvenir il faut établir un véritable rideau de fer autour de la Russie. Sur ce point, les capitalistes européens, comme nous allons le voir, sont d’accord pour s’approprier par la guerre et la destruction les restes des pays d’Europe de l’Est et d’Europe Centrale, mais ils redoutent comme la Russie que seuls les USA contrôlent les routes du pétrole vers l’Europe, ils auront donc tendance à soutenir la Russie et même pour certains à vouloir l’inclure dans l’Europe comme force militaire et ainsi voir émerger l’Europe Militaire capable de rivaliser avec les USA.. Une alliance Eurasie contre les USA c’est ce que redoutait Zbigniew Brzezinski dans son livre « Le grand échiquier », alliance qui permet (aux yeux des américains) de justifier aujourd’hui un budget de guerre colossal. »

 Voici ce que j'avais écrit dans une brochure d' Echanges de 1999 portant le titre « les droits de l' homme bombardent la Serbie ». Une analyse géopolitique des rivalités impérialistes à ce moment. Il me paraît actuellement important tant les rivalités guerrières se manifestent de vous livrer un aperçu non limitatif de la situation actuelle sous l' angle du retour de la puissance militaire de la Russie.

 Mikhaïl Gorbatchev l'homme de la perestroïka

 Quand M.Gorbatchev accède au pouvoir en avril 1985, l' économie soviétique est dans une situation très critique,voici ce qu'il dit dans ses mémoires :

 « nous savions tous combien les dépenses militaires exorbitantes pesaient sur l' économie, mais je ne parvins à saisir la dimension réelle de la militarisation du pays qu'après mon accession au poste de secrétaire. Il fallut surmonter les résistances du complexe militaro-industriel pour commencer à publier quelques chiffres. En définitive, les dépenses militaires ne se montaient pas à 16% du budget de l'État, comme il est commun de le prétendre, mais à 40%. Quant à la production du complexe militaro-industriel, elle ne représentait pas 6% du PNB, mais 20%. Sur 25 milliards de roubles des dépenses globales pour la recherche, près de 20 milliards étaient consacrés aux études militaires. » (Mikhaïl Gorbatchev, Mémoires, éd. Du Rocher, p.281)

Ensuite il va développer sur l' éternelle faiblesse du capitalisme d' État, son manque de productivité, faiblesse impardonnable pour qui se réclame du marxisme et considère la production de plus-value relative comme déterminante sous la domination réelle du capital. Il est vrai qu'en URSS l' exploitation de l' homme par l' homme était « théoriquement abolie » de même la loi de la valeur perdait de son importance au fur et à mesure du développement du socialisme.1

 « Notre économie continuait à jouer sur l' extension des capacités plus que sur l' amélioration des rendements et restait éminemment dépensière. Elle demandait entre deux et deux fois et demie plus de main-d’œuvre, de carburant et de matières premières que celle des pays industrialisés »( Mikhaïl Gorbatchev, Mémoires, éd. Du Rocher, p.282)

 Sous la présidence d' Elsine tentative de limiter la balkanisation de l’espace soviétique

 Au moment de l’éclatement de l’URSS en décembre 1991, la menace d’une balkanisation de l’espace soviétique va précipiter la création de la Communauté des États Indépendants C.E.I. La disparition de l’empire soviétique va donner naissance à quatre nouveaux états; la Russie, l’Ukraine, la Biélorussie et le Kazakhstan. Vis-à-vis de ces pays, la Russie est la nation dominante, plus de 25 millions de russes vivent hors de ses frontières. Comme nous le verrons plus loin les nouveaux dirigeants russes, sont tous d' accord pour mettre un terme au capitalisme d' État dit « état soviétique et communiste » et se couler dans l' économie de marché de l' Occident, mais ils veulent être reconnu par les instances internationales, comme puissance régionales sur la CEI.

En Ukraine, en Moldavie, dans les pays Baltes, au Kazakhstan les russes sont  majoritaires. La Russie pouvait allumer, au nom de l’autodétermination des «  Kosovos » dans ces pays. Elle ne le fera pas, car la Russie d'Elsine est en 1992 sur la défensive, sa politique extérieure est complètement favorable à l’introduction du libéralisme et des valeurs occidentales (démocratie, droit de l’homme et économie de marché).La Russie veut encore séduire l’Occident et se faire admettre de la « communauté  internationale ».

De plus, après son éclatement, elle va se trouver aux prises avec une série de conflits dit « ethniques » où les forces d’interposition de la CEI et pas seulement de la Russie vont devoir intervenir  ( Ostéite du Sud  juillet 1992, Transnistrie  juillet 1992, Tadjikistan septembre 1993). Dés 1992 par vote du parlement la Russie déclare « illégal et nul » le transfert de la Crimée (70% de russes) à l’Ukraine. Le 16 mars 2014, la Crimée par référendum 96,6 % des votants demande son rattachement à la Russie.

 

Des habitants de Crimée fêtent les résultats du référendum, le 16 mars, à Simferopol. AFP/FILIPPO MONTEFORTE

La fin des illusions.

C’est au sommet de Minsk des 12 chefs d’états de la Communauté des États Indépendants CEI ( le 22 janvier 1993) que les déboires commencent. L’économie russe est au point mort et l’inflation toujours importante. Les Russes ne vont pas tarder à avoir un certain ressentiment vis-à-vis de l’Occident, l’aide se fait attendre. Les dirigeants russes, surtout les militaires sont de plus en plus convaincus d’avoir « lâché la proie pour l’ombre ». C’est dans l’amertume que la Russie perçoit son retrait d’Europe centrale et son recul général dans le tiers monde et au moyen orient. En 1993, les forces politiques en présence en Russie sont : Celles qui sont toujours confiantes en l’Occident et celles qui considèrent que l’Ouest est l’ennemi éternel de la Russie et qui se prononcent pour une alliance avec les pays de la CEI, la Chine et l’Iran. C’est cette tendance qui va l’emporter .

 La Russie va donc faire sentir à l’Occident et surtout aux États-Unis, qu’elle n’entend plus reculer d’un seul pouce. Dés le deuxième semestre 1992, Boris Eltsine est contraint de prendre des mesures l' éloignant du diktat des États-Unis et reproche à Andréï kozyrev de « toujours dire oui » aux États-Unis. Boris Eltsine fait alors fit des menaces de sanction américaines, il autorisera la vente de sous marins à l' Iran, et de technologies à caractère militaire à l'Inde. Début janvier 1993 la Russie va s'opposer aux bombardements de l' Irak et exige le respect des résolutions de l' ONU.

La Russie va donc mener une double politique, d’une part elle va chercher à faire admettre aux instances internationales, son rôle indispensable de gendarme régional de la CEI. Le secrétaire du Conseil des ministres de la Défense de la CEI (Leonid Ivachov) considère qu’il faut un nouveau « pacte de Varsovie » pour défendre toute l’ex-URSS. De 1993 à 1994, la politique russe va s’affirmer dans ce sens et la 201éme division russe motorisée reste au Tadjikistan1.

 Le 18 février 1993, B. Elsine décrète l’embargo sur les fournitures d’armes et de technologies militaires aux états de la CEI, le 20 février, Soukhouni (Géorgie) est bombardé par les Russes; le 17 mars la Russie met fin à sa décision d’appliquer le prix mondial du gaz aux états de la CEI sortis de la zone rouble, c’est donc une faveur pour reconstituer le « Comecon ». Le 4 juillet la Géorgie et l’Abkhazie2 sont menacées de rétorsions économiques si elles refusent un cessez-le-feu. Le 3 septembre 93, l’accord de Massandra avec l’Ukraine  va annuler la dette énergétique de celle-ci en échange de la restitution des ogives nucléaires de la flotte de la mer noire et du port de Sébastopol (confirmée le 6 novembre 93, avec la ratification de START-I par l’Ukraine.

La Russie effectue une véritable reprise en main de son empire, tout en jouant sur les contradictions Europe /USA / Tiers-monde. En Octobre 1993, l’Azerbaïdjan et la Géorgie adhérent à la CEI,3 Le 3 mars 1994 conclusion d’un accord économique d’intégration avec l’Ouzbékistan, et le 25 mars 1994 la CEI obtient le statut d’observateur à l’ONU.

 En Avril 1996, Boris Eltsine et Jiang Zemin signent un pacte militaire sans les Occidentaux et le Japon avec trois pays d’Asie centrale ( Kazakhstan, Kirghizistan, Tadjikistan) en dénonçant les prétentions de Washington  à exercer un leadership mondial.

Au moment de la guerre du Kosovo en 1999, Eltsine menace de pointer des missiles sur les pays de l’OTAN.

Encart

« C’est un nouveau palier dans les relations russo-américaines, ou faut-il parler de confrontation. Pendant très longtemps, les Russes s’étaient persuadés que leur sympathie pour les US était réciproque, ou qu’ils obtiendraient quelque chose en retour un jour ou l’autre. Seulement voilà, la page est tournée, leur regard s’est dessillé, et ils ont fini par réaliser que l’animosité américaine est implacable. « Ces Russes sont vraiment sourds si c’est seulement maintenant qu’ils se réveillent«, vous dites-vous tout bas. Il suffit de lire les commentaires à l’article du New York Times au sujet de l’éxonération de Trump par Muelller pour découvrir que la haine de la Russie est au menu quotidien des élites américaines, tout autant que l’amour d’Israël. Voilà où on en est. »Israël Adam Shamir. Le 3.04.2019. Sur Entre La Plume et L’Enclume.

Quelques jours avant l’Azerbaïdjan en conflit avec l’Arménie à propos de l’enclave sécessionniste à majorité arménienne du Haut-Karabakh (territoire azeri) a réclamé l’arbitrage de l’OTAN. L’Azerbaïdjan a le soutien des USA et de la Turquie sous forme de conseillers militaires. Quant à l'Arménie, elle est armée par la Russie. Début juin 1999, débarquement des troupes russes, à la surprise de tous, sur l’aéroport de Pristina.Le sommet de Cologne du 18 au 20 juin 1999 a officiellement voulu montrer, une réconciliation entre la Russie et l’Occident.

 En réalité, Eltsine attendait le nouveau prêt du FMI de 15 milliards de $ ; la conséquence sera la réduction des allocations pour le peuple russe. D’autre part Eltsine a engagé la Russie sur la voie d’une coopération russo-USA sur le nucléaire militaire. Il faudra attendre le 8 avril 2010, pour que les présidents Barack Obama et Dimitri Medvedev signent le nouveau traité START III. Qui sera l' aboutissement du traité START I signé en 1991 entre Mikhaïl Gorbatchev et George Busch. Ce nouveau traité vise à réduire l' armement nucléaire des deux pays sur sept ans.

Sous les présidences de Vladimir Poutine

 Poutine I (1999-2004) a été le président de la restauration de l’autorité de l’Etat à l’intérieur.

Poutine II (2004-2008) a été celui de la prospérité .

Poutine III (Premier ministre et président entre 2008 et 2018) a été celui de la modernisation des forces armées.

Poutine IV (2018-2024),se veut grand réformateur de l’économie russe 

Nous allons assister, à la poursuite d'une reprise en main , de toute la zone slave et à des pactes d' alliance entre la Russie, la Chine, l' Iran et plus récemment avec la Turquie d' Erdogan. La Russie, tout de suite après la guerre avec la Georgie a lancé à l' automne 2008, une réforme militaire de grande ampleur pour moderniser ses forces armées, la priorité absolue est donné à l' arsenal nucléaire d'ici 2020. Dans le même temps un programme de développement basée sur la recherche et développement est mis en place. La part des hautes technologies dans le PIB russe devrait représenter au moins 17 à 20% à l' horizon 2020 ( elle était 10,5% en 2006). La part de la recherche militaire dans le budget global de la R&D est de 52,8%

 En mars 2014, la Russie est en mesure de procéder à une démonstration de force en Crimée, puis en Ukraine orientale. Pour rappel dés 1992 par vote du parlement la Russie déclare « illégal et nul » le transfert de la Crimée (70% de  russes) à l’Ukraine. L'Occident va considérer l' « annexion de la Crimée » comme un retour à la guerre froide. Les dirigeants russes ont bien compris le sens des manipulations occidentales des « révolutions de couleurs » comme une menace intérieure qu'ils veulent endiguer rapidement. Une garde nationale est créée en avril 2016 pour la sécurité intérieure.

 encart

Le patron du géant russe Gazprom, Alexeï Miller, a annoncé mettre fin au rabais accordé en décembre à Kiev en échange de son renoncement à un accord avec l'Union européenne, ce qui augmente le prix de plus d'un tiers, à 385,5 dollars les 1.000 mètres cubes.2014-La nouvelle était attendue: Gazprom relève les prix du gaz pour l'Ukraine à $385.5 pour 1000m3. En 2009, un conflit sur les prix et les impayés entre l'Ukraine et la Russie avait abouti à deux semaines entières d'interruption des livraisons de gaz vers l'Europe, laissant des pays comme la Bulgarie dans le noir pendant près de trois jours. Aujourd'hui l'Europe importe près de 30% de ses achats de gaz de la Russie. Depuis les événements en Ukraine, l'éventualité d'un arrêt des approvisionnements est donc dans tous les esprits.

A partir de 2014, l' UE va changer de politique vis à vis de la Russie, c' est le rattachement de la Crimée à la Russie qui va servir d' alibi à ce retournement. La Russie va perdre ses illusions vis à vis de l' UE et sa stratégie eurasiatique est provisoirement remise en cause. Par ses sanctions, l' UE se sanctionne elle même, contraignant la Russie à se tourner de plus en plus vers la Chine pour lever des fonds. La Russie de Poutine, n' est plus disposer à se faire ronger ses ailes de grande puissance, elle va le prouver lors de son intervention contre l' Etat islamique, mais surtout lors de son soutien militaire à la Syrie de Bachar al Assad. Un commentateur écrira sur le sujet :

 « la soudaine hostilité contre la Russie et Poutine peut être trouvé dans presque tous les événements non déclarés qui se sont déroulés entre la fin août et le début de septembre 2013. Ce qui est arrivé dans cette période cruciale est qu’une attaque surprise de l’OTAN contre la Syrie a été stoppée par la Russie. C’était probablement la première fois depuis la Deuxième Guerre mondiale qu’une attaque militaire planifiée par l’Occident se trouvait confrontée à une force suffisante pour exiger son annulation. On n’a pas dit aux gens en Occident pourquoi leurs dirigeants bellicistes au discours martial ont fermé les yeux. Ils ont reculé et ont décidé de changer leurs plans. Le nouveau plan : démolir l’Ukraine et s’emparer de la Crimée au profit de l’OTAN. Cela, à l’évidence, n’a pas marché non plus ; et le désordre qu’ils ont créé est toujours là. »

 La contre offensive médiatique de la Russie

 La Russie aura vite appris de l' Occident en matière de propagande, elle avait déjà un coup d' avance à l' époque soviétique , mais fut rapidement distancé par la capacité d' Hollyvood à générer des films d' actions au contenu pro-américain. C'est le mouvement des gilets jaunes qui aura révélé, cette angoisse de l' occident et notamment de Macron en personne, qui veut une loi contre les fausses nouvelles . Il s' agit ni plus ni moins d' une censure, qui vise principalement la diffusion en France de « RT France » et « Sputnik » La revue RAMSES 2018 fait ce constat :

 « Les forces armées russes ont poursuivi leurs incursion dans les espaces aériens et maritimes d' Etats membres, en mer Baltique notamment ; des cyberattaques sur des entreprises, des institutions ou des équipes de campagne électorale d' Etats membres sont attribués à la Russie. L'influence des médias russes Russia Today et Sputnik est ainsi considérée par plusieurs pays européens ( France, Suéde, Allemagne) comme une source de déstabilisation » (Ramsés 2018 p. 115)

 La Russie va pouvoir intervenir politiquement sur l' UE en s' appuyant sur les partis eurosceptiques et populistes .

 « Contrairement à la Guerre froide, lors de laquelle les Soviétiques ne soutenaient que les groupes situés à gauche de l'échiquier politique, une approche fluide de l'idéologie permet au Kremlin de soutenir simultanément des mouvements à l'extrême gauche et à l'extrême droite, certains mouvements écologiques, des mouvements anti-mondialisations et des élites de la finance. L'objectif étant d'exacerber les divisions et de créer un ensemble de soutien au Kremlin. » (Peter Pomerantsev, Michael Weiss, « The Menace of Unreality: How the Kremlin Weaponizes Information, Culture and Money », The Interpreter Magazine, 2014)

La remarque est d' autant plus intéressante, qu'elle s' est vérifiée, lors de la répression hors norme des gilets jaunes justifiée par la violence des extrêmes de gauche et de droite Mélenchon devenant un pro-russe d' extrême gauche. Il est exact que la Russie a commencée à s'intéresser aux affaires européennes, à partir de 2014 quand l' UE condamne le référendum de rattachement de la Crimée à la Russie et procède à des sanctions économiques. Il est alors fait état que fin 2014 qu' « un certain nombre de partis européens de l'extrême gauche1 et de l'extrême droite avaient reçu différentes formes de soutien organisationnel et financier de la part de la Russie afin de construire un front pro-russe et anti-européen dans l'Union européenne » ( Sources « Relations entre la Russie et l'Union européenne » Wikipédia)
Lors du sommet de Versailles en mai 2017, Macron avait ouvertement reproché à Poutine se s'ingérer dans les affaires françaises par le truchement de Russia Today et Spunik

La Russie fait son retour au moyen orient

Depuis septembre 2015, la Russie de Poutine est passé à la contre offensive politico militaire au moyen orient, c' est surtout son soutien à la Syrie et sa volonté de conserver un accès à la méditerranée qui a contraint la Russie à intervenir militairement, dévoilant du même coup sa capacité à stopper nette une offensive militaire de l' Otan. Cette opération n' a pas été neutre, elle fut aussi une démonstration qui allait remplir le carnet de commande du complexe militaro industriel russe.

Le chant du cygne du panarabisme2

Bref rappel historique

Les guerres et révolutions au moyen orient depuis la fin de la deuxième guerre mondiale et la création de l' Etat d' Israël, ne visaient qu'à asseoir la domination américaine sur la région, y compris contre la France et l' Angleterre ( la guerre de suez de 1956). Ce passage se fit sous les vocables du droits des peuples à disposer d' eux mêmes, qui entraînera la montée du panarabisme par les luttes de libérations ( Algérie, Egypte) ou accord néo-coloniaux. Les deux grandes puissances USA/URSS se retrouveront face à face au proche orient pour le partage des ressources pétrolières. Chaque camp avançant ses pions, en 1951, le gouvernement iranien de Mossadegh décide de nationaliser les gisements de pétrole sous contrôle britannique. Il n’en fallait pas plus pour que la CIA provoque un coup d’état, et place la monarchie féodale des Pahlavi, et du même coup transfert 40% du « pétrole britannique » vers les Etats-Unis. Un an auparavant, l’URSS avait de son côté appuyé le coup d’état des officiers libres d’Egypte qui renversèrent le roi d’Egypte Farouk 1er donnant ainsi le pouvoir à Nasser Gamal Abdel. Adossée comme Nasser et à l' ex URSS ou aux non alignés, ses régimes en principes laïcs seront remis en cause par les états -Unis3 . En effet comme le souligne Timothy Mitchell dans son livre Carbon Democracy :

 « Plus un régime est allié avec Washington, plus il est islamique. L' Égypte de Nasser, l'Irak républicain, le mouvement national palestinien, l' Algérie d' après l' indépendance, la République du Yémen du Sud, la Syrie baasiste : tous ces pays ont choisi une trajectoire indépendante des États-Unis. Aucun d' eux ne s' est proclamé État islamique, et ils sont nombreux à avoir réprimé chez eux les mouvements islamiques. En revanche les gouvernements dépendants des Etats-Unis ont toujours revendiqué une autorité islamique, qu'ils soient gouverné par un monarque affirmant descendre du prophète, comme en Jordanie, au Yémen du nord et au Maroc, ou prétendant à un rôle particulier de protecteur de la foi, comme dans le cas de l' Arabie saoudite »( Carbon Democracy.p, 240,241)

 Après la mort de Nasser en 1970, les États-Unis vont reprendre l’initiative au Moyen -Orient.. C’est tout le panarabisme qui va progressivement s’effondrer, échec du mouvement des non alignés. Les Etats-Unis visent l’Egypte, mais pour gagner ce pays, ils vont devoir donner à Sadate un semblant de victoire sur Israël et régler par la guerre la question du Moyen-Orient à chaud en organisant la guerre d’octobre 1973. L' arrivé de Sadate au pouvoir est considérer comme une trahison du panarabisme par les pays arabes et par les islamistes qui vont l' assassiner. La disparition de l' URSS allait mettre un terme au panarabisme et ouvrir la brèche du panislamisme et toutes ses déclinaisons wahhabiste, talibane,djiadistes, salafistes, takfiristes, jusqu'à la naissance de l' Etat islamique de Daesch.

 Conclusion

 Il était nécessaire de faire le point en ce début 2019, de l' évolution des rapports de forces sur le grand échiquier mondial, où les puissances dominantes se combattent et s' associent en permanence pour s' approprier des marchés. La force est un agent économique disait Marx, et cela est vérifiable chaque jour, qui à la force militaire avec lui actuellement , les Etats Unis, la Russie, la France , la Grande Bretagne potentiellement la Chine. Les puissances citées s' entendent pour faire monter les tensions avec comme objectif vendre des armes, mais aussi maintenir les cours des prix du gaz et du pétrole à un niveau élevés en interdisant une production trop abondante . Sont dans le collimateur l'Iran, le Vénézuela, la Libye où la France ( Total) et l' Italie ( ENI) se combattent par procuration. 4 Les libyens de tripoli ayant mis un gilet jaune en signe de protestation contre la France de Macron soutenant le mercenaire Khalifa Haftar. Depuis que Rosa Luxemburg a écrit «  Le militarisme champ d' action du capital » où elle démontrait que

 « Le transfert d'une partie du pouvoir d'achat de la classe ouvrière à l'État signifie une réduction correspondante de la participation de la classe ouvrière à la consommation des moyens de subsistance. » Mais encore «Quand on réduit les moyens de subsistance nécessaires à l'entretien de la force de travail, on libère par là même une quantité correspondante de capital constant et de travail vivant. Ce capital constant et ce travail vivant peuvent être employés à une production différente, s'il y a pour cette production dans la société une demande effective . C'est l'État qui représente cette nouvelle demande, puisqu'il s'est approprié une partie du pouvoir d'achat de la classe ouvrière grâce à la législation fiscale. Cette fois cependant l'État ne demande pas de moyens de subsistance - nous négligeons ici la demande de moyens de subsistance pour l'entretien des fonctionnaires de l'État, fournis également par les impôts : nous en avons déjà tenu compte sous la rubrique des « tierces personnes » - mais une catégorie spécifique de produits, les engins de guerre du militarisme, les armements navals ou de terre. »

En ce début du 21 siècle, le poids de la militarisation de l' économie des pays déjà cités nécessite, du fait de la concurrence technologique, une fiscalité en hausse. Chaque nouvelle génération d' armement multiplie par 10 ( parfois davantage) le coût des équipements de plus en plus sophistiqués des coûts prohibitifs intenables pour un état national comme par exemple la plupart des pays européens, seuls la France et la Grande Bretagne essayent provisoirement de tenir sachant très bien qu'ils ne pourront plus accentuer leur fiscalité pour maintenir leur puissance militaire. D' où l' éternel grelin grelin pour la constitution d' une armée européenne visant à mutualiser les coûts de la défense de l' UE

Le mouvement des gilets jaunes en France ( principalement contre la fiscalité) a démontré cette faille de l' État et du complexe militaro-industriel de la course aux armements, mais n' a pas fait le lien avec le parasitisme de la fabrication d' engin de mort, y compris le déluge de bombes5 lacrymogènes et les conséquences humaines à long terme des éborgnés et amputés par l' État grâce aux impôts que le peuple verse. Il n' est pas encore possible d' aligner le coût réel de la répression du mouvement des gilets jaunes, mais celle de Notre Dame des landes elle est évaluée à 300 000 euros par jour. Soit un coût total de 3 millions d'euros, et 30 000 euros par zadiste expulsé.

Cette première partie s'est volontairement limitée aux contradictions inter-impérialistes, la seconde abordera l' économie de la Russie et la question sociale.

Gérard Bad : finalisé le 1er mai 2019

 1-Péter Krekó et Lóránt Győri, Russia and the European Far Left (lire en ligne [archive]).

 2Le panarabisme est un mouvement politique, culturel, et idéologique fortement séculier qui vise à réunir et à unifier les peuples arabes. Il se propose de défendre l'identité arabe, et le destin partagé. Le chérif de La Mecque Hussein ben Ali est fréquemment considéré comme le fondateur du panarabisme.

3 L' alliance des USA avec l'obscurantisme islamique remonte au pacte de Quincy conclu avec ibd Saoud En échange de la protection militaire des américains ceux ci peuvent exploiter les puits de pétrole, a cet effet ils vont créer une société commune l'Arabian Américan Oil Compagny (Aramco actuellement Saudi Aramco).

4 -Alors que l’Italie soutient le Gouvernement de l’accord national (GAN) de Fayez al-Sarraj à Tripoli, également soutenu par l’Allemagne et l’ONU, la France a pris le parti de l’Armée nationale libyenne (ANL) du maréchal Khalifa Haftar, qui dirige un gouvernement concurrent à Tobrouk. L’Égypte et la Russie soutiennent également Haftar.

5-Une grenade lacrymogène coûte 30€, une lacrymo à effet sonore 40€ et une grenade de désencerclement 50€. Rien que pour le samedi 1er décembre 2018, les policiers et CRS ont aussi utilisé des lanceurs de balles de défense (LDB) à 840 reprises ainsi que 1 380 grenades de désencerclement. Au total, ce sont plus de 13 500 grenades de tous types qui ont été lancées dans les rues de Paris samedi. Les nombreux canons à eaux installés çà et là ont aussi projeté plus de 136 000 litres d’eau.

 1La Russie reste la puissance tutélaire du Tadjikistan, notamment pour la sécurité avec la présence de la 201ème division de fusiliers motorisés (la plus importante base militaire russe à l’étranger avec une capacité de 7000 hommes) dont le bail a été renouvelé jusqu’en 2042. Quelque 200 conseillers russes sont par ailleurs présents à Douchanbé pour travailler sur les problématiques de la porosité de la frontière tadjiko-afghane.

3 La Georgie quittera la CEI en 2008 suivi par l' Ukraine en 2014.

1Voir Joseph Staline -Les problèmes économiques du socialisme en URSS-Voir sur le sujet tout le développement de Paul Mattick dans son Marx et Keynes, chapitre XX Capitalisme d' état et économie mixte , ed. Nrf

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