Des manifestants lancent des pierres sur les forces de police, le 18 décembre 2017 à Buenos Aires, en Argentine afp.com/EITAN ABRAMOVICH
A la veille de la mobilisation syndicale en France du 5 décembre 2019 contre une nouvelle réforme des retraites , il est inutile dans ce texte de détailler la dite réforme des retraites ; de même pour d' autres pays, il suffit de se reporter à l' observatoire des retraites. pour cela.
Il nous faut simplement rappeler que la question des retraites est mondiale et qu' elle exige une réplique mondiale du peuple prolétaire. Cette réplique a commencé dés le début des années 1980 juste après le « retournement monétariste de 1979 ». C’est dans ce contexte que la privatisation des systèmes de retraite a été menée d’abord au Chili (1981). Le Chili de Pinochet servira de modèle pour étendre la privatisation des systèmes de retraite : au Pérou (1993), en Argentine et en Colombie (1994), en Uruguay (1995), au Costa Rica (1996) et au Mexique (1997). Les anciens systèmes de retraite par répartition ont été remplacés (totalement ou partiellement) par des fonds de pension privés. Quand la crise argentine de 2001-2002 éclate, le peso argentin s’effondre, des millions d’épargnants et de retraités se retrouvent sans rien. Des manifestations, puis de véritables émeutes s’emparent de Buenos Aires provoquant la chute de deux présidents de la République successifs (le mandat d’Alfonso Rodriguez Saá ne dure que cinq jours). Avec l’adoption d’un système de retraite par capitalisation, ce sont des millions de retraités qui vont perdre leur épargne en 2001-2002.
Le Chili fournit un bon exemple de cette dérive. Son système de retraite fragmenté, injuste, devient de plus en plus onéreux et insoutenable. En 1981, il procède à une réforme radicale et abandonne le modèle Bismarck. Il s’affranchit des normes internationales fixées par la convention 102 de l’OIT et invente un nouveau modèle de sécurité sociale, toujours obligatoire pour les salariés, mais individualisée, privatisée et financée en capitalisation (Voir page 57). Les cotisations sont versées à des fonds de pension gérés par des sociétés privées à but lucratif et en concurrence. Elles s’accumulent dans des comptes individuels. Elles constituent un capital dont chaque assuré est propriétaire, et dont il dispose librement à partir d’un certain âge. Malgré les doutes exprimés notamment par le BIT, cette réforme est d’abord couronnée de succès. Le nombre de cotisants, qui ne cessait de diminuer, remonte. Les fonds de pension contribuent à la privatisation des entreprises nationales et obtiennent des rendements enviables pendant une vingtaine d’années. Le Chili, avec son strict équilibre budgétaire, fait figure de modèle, alors même que l ’Amérique latine connaît une crise économique avec une très forte inflation et un endettement massif. ( Sources l' observatoire des retraites)
15 ans plus tard ,fin 2017, des milliers de manifestants à Buenos Aires sont dans les rues contre une nouvelle purge des retraites votée par les députés. Cette réforme retarde l'âge de départ à la retraite et change le calcul pour la revalorisation des pensions. Dans un pays où l'inflation galopante n'a cessé de rogner leur pouvoir d'achat les retraités se trouvent acculés à une paupérisation qui déchaîne la colère.
2019 au Brésil 45 millions de travailleurs grévistes
Des manifestations avaient lieu dans 188 villes des 27 États du Brésil, a indiqué le site G1 en début de soirée. Les syndicats ont fait état de 45 millions de travailleurs grévistes dans 300 villes.
Partout les illusions vont tomber, pour la simple raison que l' attaque du capitalisme visant à repousser l' âge de la retraite jusqu' à l' anti-chambre de la mort n' est plus à démontrer mais à combattre.
Le Mexique est lui aussi entraîné dans la tourmente mondiale des déficits. Selon le Forum économique mondial les engagements non couverts en matière de retraite sont une véritable bombe à retardement. Ils atteignaient les 70 000 milliards de dollars en 2015, et pourraient dépasser les
400 000 milliards en 2050 dont 137 000 milliards pour les Etats-Unis. Les pays émergents sont concernés par cette dérive. La Chine et l’Inde devraient voir leur besoin de retraite non couvert progressé de 7 et à 10 % par an.
Le nouveau Président Andrés Manuel López Obrador (AMLO) élu fin 2018, a annoncé la mise en place à court terme d’une pension universelle, comme E.Macron en France
« La première mesure prise par le nouveau Président est la mise en place d’une retraite universelle, sur le modèle de celle mise en place dans la ville de Mexico lorsqu’il en était gouverneur. Celle-ci viendra remplacer les programmes actuels et doublera le montant des aides ; elle sera versée sans conditions de revenus. Les retraités toucheront désormais une pension de 1 200 pesos mensuels, soit le double de la pension actuelle (580 pesos) ; l’âge minimum pour l’accès à cette aide est en revanche relevé à 68 ans (contre 65 actuellement), à l’exception des peuples indigènes qui pourront toujours en bénéficier dès 65 ans – mesure appliquée dès le 1er janvier 2019[4]. Le budget approuvé pour 2019 prévoit une augmentation de 150% des ressources dédiées à ces aides, passant de 2 Mds USD à 5 Mds USD – ce qui devrait permettre à 6,5 M de retraités mexicains de recevoir cette pension ; les ressources budgétées ne permettent en revanche pas de verser cette pension à 8 millions de bénéficiaires, comme initialement annoncé par le Président. Cette mesure a globalement suscité des réactions positives, bien que certaines critiques demeurent quant à l’effet d’aubaine lié au caractère universel de la prestation : même les plus riches pourront en bénéficier. » sources ministére de l' économie et des finances
Pas d'illusion à se faire à moyen terme et long terme.
En attendant, les gouvernements vont nous vendre de l'(illusion à la Procuste) sous le couvert d'une nouvelle mutualisation du coût des retraites dites Universelles qui consiste à déshabiller pierre pour habiller Paul.
Dans les pays de l’UE, c’est à qui avancera le plus vite pour faire sauter toute référence d’âge pour prendre sa retraite et reculer la date de cette retraite à coup de loi tout en gelant ou baissant les pensions. Cette offensive de la classe capitaliste s’effectue de manière différente selon les pays.
Dès les années 1990, les États européens s'attaquent aux systèmes de retraite : En Allemagne « réforme 1992 », Italie réforme Amato (1992) et Dini (1995), France réforme Balladur (1993) et plan Juppé ( mis en échec par le mouvement social de 1995). D’autres comme les Pays-Bas, l’Irlande, le Danemark, l’Espagne conclurent des pactes sociaux visant à réformer les systèmes de retraite en fonction des critères de Maastricht.
Dés les années 2000, poursuite des mesures contre les retraités, la traite se fait par les deux bouts , allongements du temps de travail pour prendre sa retraite , et gel des revalorisations des pensions. Le socialiste espagnol Zapatero donne l' exemple et prolonge la possibilité de prendre sa retraite de 65 ans à 67 ans et à partir de 2010 supprime la revalorisation des retraites. Il procédera en 2011 au gel des salaires des fonctionnaires, le Portugal suivra, la Grèce est dans le même sillage. L' Allemagne et la France vont suivre. En France le président Hollande poursuit les réformes de son prédécesseur Nicolas Sarkozy. Ce dernier avait allongé de six trimestres le temps de cotisation entre 2003 et 2019 pour avoir une retraite à taux plein. Le président Hollande poursuit lui aussi en augmentant de six trimestres de 2020 à 2035. Ce qui veut dire que les salariés nés en 1973 seront dorénavant rivés au boulot jusqu’à 68 ans.
le mouvement contre la réforme Fillon II en 2010.
La « réforme Fillon I» (ou « loi Fillon août 2003») instaure une transition progressive de la durée de cotisation de tous les régimes, sauf les régimes spéciaux, vers 42 ans. Est ainsi décidé dans un premier temps d'aligner la durée de cotisation des fonctionnaires : elle est ainsi allongée de 37 ans et 1/2 à 40 ans à l'horizon 2008, à raison d'un semestre par an.
Les deux réformes Fillon ont révélé la faiblesse tant de la bourgeoisie que de celle du monde du travail. Nous avons déjà montré la force et la faiblesse des manifestations contre la réforme des retraites (voir Le mouvement contre la réforme des retraites est aussi un mouvement contre la précarité et la paupérisation, Echanges n°134, automne 2010) . Notamment que les syndicats étaient toujours les seuls à pouvoir organiser des manifestations significatives à l’échelle de toute la France ; et les grèves syndicales sont pipées parce qu’elles rassemblent surtout des professionnels de la manif.
Débuté en mars 2010, le mouvement social contre la réforme des retraites en France en 2010 a mobilisé à huit reprises plusieurs millions de salariés dans les secteurs public et privé. L'objet immédiat est de protester contre le relèvement de 60 à 62 ans de l'âge légal de départ à la retraite et de 65 à 67 ans de l'âge auquel un salarié n'est plus pénalisé par le système de décote. Le gouvernement met en place une approche par réduction des dépenses publiques (retraites, santé). L'opposition estime ce projet socialement injuste et économiquement dangereux : elle souhaite plutôt augmenter les entrées fiscales en supprimant les niches fiscales et en augmentant les prélèvements obligatoires.
En Russie, c’est durant la période 2004-2005 que le président Poutine a fait appliquer la loi dite de « monétarisation des avantages sociaux » ; cette loi vise les acquis notamment des retraités, anciens combattants, vétérans de la seconde guerre mondiale et invalides du travail. C’est aussi une attaque en règle contre la gratuité des transports publics, de certains médicaments et du téléphone. Dès le début du mois de janvier 2005, la riposte du peuple russe sera imposante, avec des actions radicales : blocage des rues et des axes routiers. Les manifestants réclameront la démission de Poutine, posant ainsi la question du pouvoir. En 2018, Poutine s'attaque comme ses confrères occidentaux à l' âge pour prendre sa retraite, d'importantes manifestations auront lieu dans tout le pays le 28 juillet 2018. C' est le premier ministre Dimitri Medvedev qui annonce que le seuil pour partir en retraite passe à 65 ans pour les hommes d'ici 2018 et 63 ans pour les femmes d'ici 2034. Soit huit années de plus pour les femmes, cinq pour les hommes.
De l’importance de la lutte contre les réformes des retraites
Tout d’abord cette lutte touche le plus grand nombre et elle est la plus unificatrice du monde du travail, elle intéresse les jeunes comme les seniors (on est senior à partir de 45 ans). Elle dépasse les frontières nationales et est commune au secteur privé et public. Elle est directement politique ; elle cible non seulement l’Etat, mais le capital financier à l’échelle mondiale. En France la « bataille des retraites » aura connu deux points forts :
-le mouvement de 1995 centré sur la fonction publique à demi-victorieux puisque le projet Juppé fut retiré .
-Celui de 2010 contre la réforme Fillon II
-Le projet Macron-Philippe il a pour objectif de s'attaquer à la Fonction publique et aux régimes spéciaux.
G.Bad
Voir aussi Comment faire crever les retraités.
Nous vous invitons également à essayer le simulateur de Sud Education !
Et la brochure en PDF https://retraites.sudeducation.org/brochure/brochure-retraites.pdf
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