Echanges N°151 printemps 2015
Postscriptum à « La victoire de Syriza aux dernières élections générales en Grèce » *
Dans
les rangs de Syriza, le Dr. Varoufakis (qui sera désormais le Dr.V.)
est aussi un marxiste autoproclamé – bien que peu orthodoxe, comme il le
dit lui-même, dans la mesure où il a remplacé la théorie de la valeur
sociale du travail abstrait par une théorie humaniste de la valeur du
travail (1). Il a pour ambition d’enrôler Bloomerg et les journalistes
du New York Times, les députés Tory, les financiers humanistes, les
militants de Syriza en Grèce et les éléments subversifs réunis à Zagreb
au service d’une cause qui consiste à « sauver le capitalisme de
lui-même », c’est-à-dire à dompter « l’esprit d’entreprise ». Son faux
dilemme entre capitalisme ou barbarie (la barbarie, dans le contexte
politique de l’Union européenne [UE], signifiant le nationalisme de
droite et le néonazisme) a pour but la préservation et la
démocratisation de l’Eurozone et la Banque centrale européenne (BCE). En
utilisant l’imagerie de Matrix, cet économiste social-libéral branché
aspirait à fournir aux populations européennes la « pilule rouge » qui
vous emmène au fond du terrier jusqu’au désert de la réalité,
c’est-à-dire à la « vérité » sur la vie, la société et la «
quantification » du travail. En s’appuyant sur ces connaissances, les «
gens » pourraient entreprendre de lutter afin de réformer les politiques
des institutions capitalistes européennes (2) . Devenu ministre des
finances, et après avoir abandonné la rhétorique utilisée pendant
quelques jours à propos des renflouements et de la dure politique
d’austérité qui avaient provoqué « la dépression, le cynisme, la
désintégration et la misanthropie », le Dr.V. a eu tôt fait de réaliser
que si lui et son parti voulaient être acceptés dans les hautes sphères
du personnel politique du capitalisme européen, ils devaient renoncer à
leurs aspirations et à leur guerre des mots contre la politique
officielle de l’UE. Au moment même où la BCE durcissait les conditions
d’octroi de liquidités à la Grèce, l’optimisme initial de la nouvelle
bureaucratie de l’Etat, auquel nous faisions allusion au début de notre
texte précédent, s’évapora promptement. Personne ne pénètre
gratuitement dans les palais du capital.
Les dix jours qui n’ont pas fait trembler l’Eurozone.
Dès les premiers jours de février, le conflit entre ces positions a tourné au spectacle des négociations entre le gouvernement
grec et ses « partenaires ».
Le
2 février, alors que notre dernier texte n’avait que quelques jours, le
Dr.V. a déclaré depuis Londres que le gouvernement grec ne demanderait
pas l’annulation de la plus grande partie de la dette souveraine
grecque. Le 5 février, au cours de sa première rencontre avec Schäuble,
le Dr.V. avait ajouté qu’il accepterait 70 % des « programmes » prévus
(c’est-à-dire les mémorandums). Et il a ajouté que le gouvernement grec
avait le « devoir moral » de ne pas faire endosser le fardeau de la
dette grecque aux « contribuables européens ».
En
réalité, un mythe, très répandu et très largement accepté, veut que
depuis 2010 les « contribuables européens » aient financé les « Grecs
paresseux » qui « vivent au-dessus de leurs moyens » par le biais des
prêts accordés par les Etats membres de l’UE, le FMI et la BCE.
Mais
si nous examinons la manière dont on a transformé la structure de la
dette souveraine grecque depuis 2009, nous pourrions aboutir à des
conclusions très différentes. En 2009, la dette grecque se trouvait
principalement entre les mains des banques françaises et allemandes qui
bénéficiaient toutes deux des taux d’intérêt élevés des obligations
grecques et de la garantie politique qu’un Etat membre de l’UE ne peut
pas faillir à ses engagements. Le risque encouru par les banques
françaises s’élevait à 78 milliards de dollars, tandis que les banques
allemandes détenaient 45 milliards de dollars d’obligations grecques.
Dès 2014, grâce au programme initial de renflouement de 2010 qui
consistait en prêts bilatéraux accordés à la Grèce par les autres Etats
membres de l’UE, et grâce à l’agrément Prestataire de services
d’investissement (PSI) et au mécanisme Fonds européen de stabilité
financière (FESF) consécutif, on avait considérablement réduit le risque
toxique auquel étaient exposées les institutions bancaires (par
exemple, il n’était plus que de 1,8 milliard de dollars pour les banques
françaises et de 13,5 milliards de dollars pour les allemandes), ce qui
représente vraisemblablement aujourd’hui leurs pertes réelles.
Puisque
l’on a réparti le coût du renflouement des banques sur les Etats
membres, ceux-ci détiennent une part plus importante de la nouvelle
dette grecque. Même les pays initialement peu exposés aux risques de la
dette grecque, tels l’Italie et l’Espagne, détiennent maintenant
respectivement 10 et 6,7 milliards d’euros de dette grecque. Cependant,
hormis les premiers prêts bilatéraux accordés à la Grèce pour un montant
de 52,9 milliards d’euros, ni la Grèce ni personne d’autre n’a reçu le
moindre argent des contribuables de l’Eurozone, car dès la mise en œuvre
du deuxième programme de renflouement, l’Eurozone avait mis en place
son propre fonds de renflouement, le FESF, dont le seul financement
était la garantie que constituaient les engagements des Etats membres.
Le FESF se procurait de l’argent en émettant des obligations, et donc le
seul risque qu’encoure le « contribuable européen » est la faillite
éventuelle des investissements du fonds (3).
Résumons-nous
: le « renflouement » de la Grèce fut en fait un renflouement massif
des banques françaises et allemandes, globalement financé par les
prolétaires de l’Europe du Sud, mais que l’on a travesti en « solidarité
» envers les Grecs « dépensiers et paresseux » que dénonce cette
créature imaginaire, « le contribuable européen ». En outre, la Grèce
n’a jusqu’à présent utilisé qu’entre 8 % et 11 % de l’argent versé pour
couvrir les besoins du budget de l’Etat. Le reste a été retourné aux
prêteurs et aux banques, alimentant la bulle financière fictive basée
sur la spéculation sur la dette souveraine.
Au
cours de la décennie précédente, avant le début de la crise, les prêts
accordés au Sud fournissaient le supplément d’argent dont il avait
besoin pour réaliser la plus-value des marchandises produites dans le
Nord.
L’Allemagne, victime
d’une chute de 5 % de son PIB au cours des deux premières années de la
crise et d’une reprise insuffisante après 2012 (4) est convaincue
qu’elle ne réussira à sortir de la crise qu’en entretenant une « crise
de la dette » dans le Sud, en restructurant ses exportation chez elle et
délocalisant en Europe de l’Est (5).
Après
tout, le programme de dévalorisation massive du Sud de l’UE, qualifié
de «restructuration de la dette » et implacablement mis en œuvre dans
l’Eurozone, a contribué à détourner les flux monétaires et les flux de
capitaux de la « périphérie » de l’Eurozone vers les pays « importants »
de l’Eurozone, permettant par exemple à ces derniers de financer leurs
déficits budgétaires à moindres frais (6). C’est la raison pour laquelle
l’Allemagne tient absolument à ce que ses plus-values nettes
extérieures ne soient pas « gâchées » dans la production de ses marchés
intérieurs au sud et soient au contraire réaffectés aux zones satellites
productives et consommatrices d’Europe de l’Est.
L’effort
durable qu’a entrepris la classe capitaliste européenne pour réduire le
compromis institutionnalisé avec la classe ouvrière de l’après-guerre,
la protection des institutions financières principaux instruments
d’« accumulation par dépossession » et le mercantilisme allemand sont
les principales causes de la poursuite des politiques d’austérité
(dévaluation interne) sur tout le continent.
Pour
en revenir aux événements récents : au dernier moment, l’Eurogroupe
[réunion des ministres des finances de la zone euro] a conclu un accord
formalisé dans deux documents d’un style managérial : « Déclaration de
l’Eurogroupe à propos de la Grèce (7) » ainsi que : « Liste des mesures
de réforme (8) ». Ce dernier document émane du gouvernement grec, il a
été soumis par le Dr.V. et a été accepté par l’Eurogroupe. Ces deux
documents sont la preuve que la position de l’Etat grec au sein de
l’interaction hiérarchique de l’Eurozone entre les Etats-nations «
centraux » et les « périphériques » demeure un statut d’une « colonie
intérieure débitrice ». L’Etat grec, en acceptant la législation
anglaise et le cadre de la cour de justice luxembourgeoise, continue à
renoncer à ses droits et à la protection de ses biens et n’est pas
autorisé à adopter la moindre politique sans l’accord préalable des «
institutions », c’est-à-dire de la Troïka : « Les autorités grecques
s’engagent à s’abstenir de toute réduction des mesures déjà mises en
œuvre et de toute modification unilatérale des politiques et des
réformes structurelles qui auraient un effet négatif sur les objectifs
fiscaux, la reprise économique (sic) ou la stabilité financière, tels
que les institutions les ont définis. »
Il
est bien clair que depuis que le gouvernement grec eut depuis longtemps
manifestement fait le choix politique de s’orienter ni vers un contrôle
des capitaux, ni vers une annulation unilatérale de la dette, ni de
menacer ses « partenaires » d’une sortie immédiate de l’euro, il allait
céder à leur grossier chantage, ce n’était qu’une question de temps :
pendant les négociations, la BCE a cessé d’accepter en garantie des
avances financières les obligations du gouvernement grec; on les a aussi
menacés ouvertement d’imposer aux banques grecques des limites au
retrait de liquidités s’il n’y avait pas d’accord à l’Eurogroupe le 20
février. Après tout, les élections prochaines en Espagne, au Portugal et
en Irlande, où les partis anti-austérité semblent monter en puissance,
ne laissaient pas de place pour des manœuvres politiques, des paroles
aimables et moins encore et plus significativement pour des concessions
financières à la Grèce.
Contraint
de se rabattre sur la seule option de la « pilule bleue » (« tu
retourneras te coucher et te réveilleras le matin en croyant tout ce que
tu veux et en pensant que toute cette histoire sur la “fin de
l’austérité” est une “réalité” avant de reprendre le cours de ta vie
“normale” »), le gouvernement grec soutient que l’accord avec ses «
partenaires », et particulièrement la « Liste des mesures de réforme »,
est dominée par une « ambiguïté créative » censée lui donner toute
flexibilité en ce qui concerne les mesures à prendre. Mais nous pensons
que les deux documents précités sont tout à fait clairs et prouvent que
le gouvernement de Syriza, contrairement même au programme édulcoré que
nous analysions dans notre texte précédent, est d’accord pour poursuivre
la politique d’austérité de dévaluation des capitaux dans le cadre des
Mémorandums et des « institutions ».
On
ne saurait donc s’étonner que ce « nouvel » accord soit soutenu par
presque tous les partis politiques, à l’exception du parti communiste
stalinien (KKE) et du parti néonazi (GD) (9).
Voler Pierre pour payer Paul
Avant
de développer chacune des parties que « traite » l’accord et pour
comprendre pleinement le revirement de Syriza, il est utile de rappeler
que le Dr. V. s’est engagé
dans les « négociations » au nom d’un gouvernement qui avait déclaré qu’il :
‰
1. rejetterait l’extension du « programme » et la tranche de 7,2
milliards d’euros, à l’exception du 1,9 milliard d’euros de bénéfices du
remboursement des obligations BCE ;
‰ 2. n’accepterait aucun programme de supervision ou d’évaluation ;
‰
3. souhaiterait l’établissement d’un « programme transitoire » de six
mois, sans aucune mesure d’austérité destinée à s’assurer les
liquidités, qui lui permettrait d’utiliser les fonds du Fonds de
stabilité financière hellénique (FSFH) et de mettre en œuvre au moins
une partie de son programme, avec des budgets en équilibre ;
‰
4. exigerait que les prêteurs reconnaissent que la dette n’était pas
supportable et qu’il faudrait engager prochainement un nouveau cycle de
négociations générales.
Que
s’est-il passé alors que la « Troïka » était censée mourir de mort
violente aux mains du Dr.V. ? Examinons un par un les « succès » dont se
vante le gouvernement :
Gestion souveraine de la dette :
la déclaration de l’Eurogroupe à propos de la Grèce est très claire : «
Les autorités grecques réaffirment clairement qu’elles s’engagent à
honorer, intégralement et en temps voulu, leurs obligations financières
envers tous leurs créditeurs. » Et ce n’est pas tout, car le nouveau
gouvernement grec accepte de réaliser d’imposants surplus afin de
rembourser la dette, ce qui signifie simplement qu’il renonce à sa
revendication principale d’engager des négociations en vue de la
réduction de la dette souveraine grecque : « Les autorités grecques se
sont également engagées à s’assurer d’imposants surplus financiers
appropriées ou les recettes financières suffisantes, nécessaires à la
garantie de la dette soutenable en accord avec la déclaration de 2012 de
l’Eurogroupe. En ce qui concerne l’objectif des plus-values primaires
pour 2015, les institutions tiendront compte de la conjoncture
économique de 2015. » En outre, en acceptant de réaliser des surplus
importants, le gouvernement sape expressément les prévisions financières
de son propre programme, même dans sa version modérée la plus récente
avant les élections. Comme le montrent les dernières estimations, les
surplus en 2014 ne s’élèvent qu’à 0,3 % du PIB (contre le 1,5 % attendu)
et il faudra donc que le budget 2015 prévoie d’autres coupes pour un
montant de 2 ou 3 milliards d’euros dans le seul but d’atteindre la
plus-value de 1,5 % que prévoyait la modeste proposition de Syriza.
Il
ne fait aucun doute qu’avec cet accord, le gouvernement grec s’engage à
poursuivre sa politique d’austérité pour une période indéfinie.
Système
bancaire et dette privée : l’un des slogans les plus connus de Syriza
proclamait « Banquiers, ne touchez pas à nos maisons ! ». Mais selon la
liste des mesures de réforme que le Dr.V. a soumise à l’Eurogroupe : «
La Grèce s’engage à collaborer avec les directions des banques et les
institutions afin d’éviter, au cours de la période à venir, la mise en
vente de la résidence principale des foyers dont le revenu est inférieur
à un certain seuil. » Dans le même document, « La Grèce s’engage à
s’occuper des prêts non rentables de manière à prendre totalement en
considération la capitalisation des banques … le fonctionnement du
système judiciaire, l’état du véritable marché de l’immobilier, les
problèmes de justice sociale, ainsi que tout effet négatif sur la
position fiscale du gouvernement. » Et pour finir « La Grèce s’engage,
en accord avec les institutions, à améliorer rapidement la législation
concernant le remboursement de l’impôt et des arriérés de sécurité
sociale. »
Le gouvernement
tente de mettre au point des plans spécifiques pour le remboursement,
aux banques ou à l’Etat, de la dette privée. La caractéristique
principale de ces plans est la fragmentation des débiteurs en de
multiples catégories, selon leurs revenus, assortie des garanties
correspondantes pour le remboursement des dettes. Mais, si l’on tient
compte des termes et des conditions prévus dans la liste du Dr.V. et du
fait que les « institutions » doivent préalablement approuver ces plans,
il est fort probable que leur mise en œuvre sera soumise à des
conditions beaucoup plus sévères, déterminées par les « institutions ».
Un
autre plan du gouvernement grec consiste à instaurer une institution
pour la gestion de la dette privée (c’est-à-dire un plan de « mauvaise
banque ») qui rachètera aux banques les prêts non rentables à 50 % de
leur valeur nominale. Les débiteurs ne devront alors rembourser qu’une
partie de leur dette, le reste étant couvert par l’Etat. Dans le but
d’instaurer cette institution, le gouvernement voulait réaffecter 3
milliards d’euros provenant du FSFH. Non seulement cette demande a été
rejetée, mais en outre : « Conformément à l’évaluation des institutions
l’Eurogroupe s’accorde pour dire que les fonds jusqu’ici détenus par le
FSFH soient transmis au FESF, libres des droits des tiers pour la durée
de l’extension du MFFA (Master Financial Assistance Facility Agreement).
Les fonds continueront à être disponibles pour la durée de l’extension
du MFFA et ne pourront être employés qu’à la recapitalisation des
banques et au règlement des coûts. Ils ne seront accordés sur demande
que par le MSU de la BCE. »
Pour
vous donner une idée de ce que signifie le chantage de l’Eurogroupe et
de la BCE : 1,2 milliard d’euros sur les 11 milliards d’euros du FSFH
que Syriza ne pourrait pas utiliser à d’autres fins budgétaires que la
recapitalisation des banques, et uniquement si la BCE lui donne le feu
vert, correspond à la simple contribution de l’Etat grec à ce fonds.
Plus
largement, les « partenaires » ont utilisé les pressions exercées sur
le système bancaire grec comme moyen de chantage pour obliger Syriza à
accepter leurs conditions. En particulier, le 4 février 2015, pendant
les négociations entre le gouvernement grec et l’Eurogroupe, la BCE a
cessé d’accepter les obligations du gouvernement grec comme garantie,
action qui a renchéri le coût des liquidités pour les banques grecques
de 1,5 % ou d’environ 1 milliard d’euros, puisqu’elles ne pouvaient plus
emprunter directement à la BCE à un taux d’intérêt de 0,0 5%, mais
seulement sur les fonds du FLU à un taux d’intérêt de 1,55 %.
La
situation s’est encore aggravée en raison d’une fuite des dépôts
d’environ 26 milliards d’euros depuis décembre dernier (au total, depuis
février, les dépôts dans les banques grecques ont diminué de 100
milliards d’euros, c’est-à-dire qu’ils sont passés de 237,8 milliards
d’euros à environ 138 milliards d’euros). Un autre moyen d’exercer une
pression directe a été de refuser au gouvernement grec le droit, pour
financer son déficit, d’utiliser les profits de la BCE (1,9 milliard
d’euros) réalisés sur les achats d’obligations sur le marché secondaire
pendant la durée de l’accord IAE. On a en outre refusé aux banques – du
moins jusqu’à l’évaluation et l’approbation de la liste de réformes par
les « institutions » – le droit d’augmenter indépendamment leur
couverture en obligations grecques, décision de la BCE qui limite encore
davantage les ressources financières de Syriza pour rembourser les
intérêts de la dette souveraine (10).
Nous reviendrons sur certaines conséquences de cet assèchement des liquidités.
Privatisations/nationalisations :
dans notre texte précédent, nous disions que « Syriza n’avait pas
changé sa position de mettre fin à la privatisation des services
publics, de l’infrastructure et des entreprises publiques. » Ça, c’était
avant les négociations avec les « partenaires ». La liste des mesures
de réforme arrêtée avec l’Eurogroupe est claire : afin d’« attirer
l’investissement dans les secteurs clés et d’utiliser efficacement les
atouts de l’Etat, les autorités grecques :
-
s’engageront à ne pas revenir sur les privatisations déjà effectuées. Là où un processus d’adjudication est déjà engagé, le gouvernement le respectera, en accord avec la législation ;
-
- étudieront les privatisations qui ne sont pas encore en cours, en vue d’en améliorer les conditions de façon à maximiser les bénéfices à long terme de l’Etat, à générer des revenus, à favoriser la compétition au sein des économies locales, à encourager le redressement de l’économie nationale [sic] et à stimuler les perspectives de croissance à long terme ; -
- adopteront dorénavant une méthode par laquelle chaque nouveau cas sera examiné séparément et pour ce qu’il vaut, en insistant sur les contrats de longue durée, les joint-ventures (collaboration privé-public) et les contrats susceptibles de ne pas maximiser les seuls revenus du gouvernement, mais également les niveaux prospectifs de l’investissement privé. »
(à suivre)
NOTES
* Voir Echanges n°150, p 10. Faute de place, nous publions ce texte (traduit de l’anglais par A. G.) sur deux numéros.
(1) Toutes les références et allusions contenues dans ce paragraphe sont consultables en ligne à l’adresse suivante : http://yanisvaroufakis.eu/2013/12/10/confessions-of-an-erratic-marxist-in-the-midst-of-a-repugnant-european-crisis/.
Nous remercions Harry Cleaver pour avoir attiré notre attention sur ce texte qui a été présenté au Festival subversif de Zagreb en 2013.
(2) En suivant le script, bien entendu, de sa Modeste proposition pour résoudre la crise de l’Eurozone (co-écrit avec Suart Holland et James Galbraith – Institut Veblen, Paris, 2012 : http://www.veblen-institute.org/IMG/pdf/modest_proposal_30_final.pdf). Cette modeste proposition accepte toutes les contraintes que les institutions européennes actuelles font peser sur l’action politique et rejette toute politique keynésienne d’expansion social-démocrate. Elle se borne à proposer l’européanisation de quatre domaines d’activité, précisément dans le cadre institutionnel de l’euro : les banques à la recherche d’une injection de capitaux du MSE (mécanisme de stabilité européen), la gestion de la dette souveraine, le recyclage de l’épargne européenne et mondiale dans des investissements socialement productifs et le financement rapide d’un programme d’urgence sociale de base. C’est-à-dire une modification productive de la politique d’austérité, basée en réalité sur le contrôle de plus en plus centralisé par les principales institutions de l’UE des politiques financières nationales.
(3) Il est intéressant de noter qu’en ce qui concerne les prêts bilatéraux de 2010, et à l’exception de la Slovaquie qui a refusé de contribuer, l’Allemagne fut le seul Etat membre à fournir des garanties à sa banque de développement KfW, notée AAA, qui s’était procuré les fonds en émettant des obligations. Les véritables injections de liquidités provenaient des autres membres de l’Eurozone.
(4) L’économie allemande a progressé de 3,93 % en 2010, de 3,66 % en 2011, de 0,58 % en 2012, de 0,21 % en 2013 et de 1,47 % en 2014.
(5) Certes, ce processus n’est pas nouveau, il n’est relancé que par la soi-disant crise de la dette dans l’Eurozone. Pour un bref aperçu de la politique étrangère allemande, voir S. Gross, The German Economy Today : Exports, Foreign Investment, and East-Central Europe.
(6) L’Allemagne est un bon exemple de la manière dont les pays « importants » de l’Eurozone bénéficient de la dissémination rapide de la crise de la dette à travers tous les PIGS et de la chute consécutive et tout aussi rapide des rendements obligataires dans le Nord. On a estimé que grâce à l’intérêt cumulé le budget allemand s’allégera d’environ 67 milliards d’euros, s’ajoutant aux avantages sur le taux d’intérêt acquis entre 2010 et 2012 et à ceux dont l’Allemagne a bénéficié au cours des années suivantes, selon un article publié par Allianz en septembre 2012 ((http://www.reuters.com/article/2013/05/02/us-eurozone-bailouts-idUSBRE9410CG20130502)) – sans parler de la croissance massive de ses exportations qui ont atteint un niveau inédit de 1,13 trillion d’euros, engendrant une plus-value commerciale de 217 milliards d’euros, la plus élevée du monde en 2014, grâce au faible taux de change de l’euro. Il n’est donc pas étonnant que les comptes de l’Allemagne montrent des excédents croissant de façon ininterrompue depuis 2009 (jusqu’à 7,5 % de son PIB en 2013), tandis que, pour la première fois depuis 1969, elle annonce que son budget est en équilibre. Hormis le financement de leur dette souveraine par le biais de taux d’intérêt réel bas, voire négatif (cependant que, selon le premier mémorandum, la Grèce était contrainte à rembourser les intérêts à un taux fluctuant entre 5 % et 6 %), les profits des pays « importants » de l’Eurozone sont à la fois significatifs et multilatéraux. De 2009 à 2013, par exemple, l’Allemagne
et les Pays-Bas ont enregistré la plus forte augmentation des nouveaux projets d’investissements directs étrangers (IDE) de tous les pays de l’Eurozone. L’Allemagne (1 525 IDE supplémentaires, soit un accroissement stupéfiant de 115 %), en particulier, a surpassé la France et se trouve à présent en deuxième position, après le Royaume-Uni, à la tête de tous les pays européens. La Finlande en a elle aussi bénéficié récemment, devenant désormais le neuvième Etat capitaliste parmi les destinations européennes des meilleurs investissements (+ 44 % de nouveaux IDE en 2013 par rapport à 2012) – sans parler des profits réalisés sur le dos des Grecs, des Espagnols et des Portugais grâce aux obligations qu’elle détient.
(7) Voir : http://www.consilium.europa.eu/en/press/press-releases/2015/02/150220-eurogroup-statement-greece/
(8) Voir : http://s.kathimerini.gr/resources/article-files/lista-metarry8misewn.pdf
(9) Cette nouvelle alliance et ce nouveau consensus – il convient aussi de prendre en compte l’élection récente du candidat de Syriza, homme politique de la droite modérée, à la présidence du pays – peut jeter les bases d’un futur parti de « gouvernement de sauvegarde nationale », si ce gouvernement échoue à avancer pendant le nouveau cycle de dévaluation interne. Cet alignement presque unanime sur les grands principes néolibéraux jette également les bases d’une nouvelle version de la « théorie des deux extrêmes », dont nous reparlerons plus loin.
(10) L’impasse dans laquelle se trouve Syriza est encore plus grave depuis l’établissement des arriérés d’impôt et de non remboursement, dont le résultat est une perte de revenus de 1 à 2 milliards d’euros depuis le début de l’année.
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